Les premiers mois du second mandat de Donald Trump l’auront confirmé : opposer une fin de non-recevoir au milliardaire républicain revient à s’exposer à des représailles. Le dernier en date à en avoir fait l’expérience est sans doute, aucun, Jerome Powell, le patron de la Fed, la banque centrale américaine. Voilà plusieurs semaines que Donald Trump le presse comme un citron pour lui arracher une baisse des taux d’intérêt, allant jusqu’à brandir la menace du limogeage.L’étau s’est encore resserré cette semaine après que Jerome Powell a dénoncé mercredi les méfaits de la politique commerciale protectionniste de Donald Trump. “Les droits de douane vont très certainement entraîner au moins une hausse temporaire de l’inflation” avec la possibilité que “les effets inflationnistes soient également persistants”. Dans la foulée, Donald Trump s’empresse de publier sur sa plateforme Truth Social une nouvelle pique à l’encontre du président de la Fed qu’il a lui-même nommé, sept ans plus tôt : “Il est plus que temps que le mandat de Powell se termine.”Aux côtés de la Première ministre italienne, Giorgia Meloni, qu’il a reçue dans le bureau Ovale jeudi, Donald Trump est revenu à la charge, accusant Jerome Powell de “faire de la politique” avec les taux d’intérêt. “Je ne suis pas content de lui. Je lui ai fait savoir et si je veux qu’il parte, il partira vite fait, croyez-moi”. Et d’enjoindre une nouvelle fois le président de la Fed à “baisser les taux d’intérêt”, prenant alors pour modèle la Banque centrale européenne (BCE) qui a fait reculer d’un quart de point ses taux directeurs jeudi. Ce vendredi, la Maison-Blanche a officiellement annoncé étudier la possibilité de limoger Jerome Powell.Powell sommé de servir l’agenda TrumpUne obsession qui n’est pas sans lien avec les élections de mi-mandat prévues fin 2026. En baissant les taux, Donald Trump espère insuffler un coup d’accélérateur à l’économie avant le prochain scrutin. Et pour cause, des taux plus bas, c’est un crédit moins cher pour les ménages comme pour les entreprises, donc plus de consommation, plus d’investissements. Une telle manœuvre permettrait par ailleurs de réduire le coût de la charge de la dette et de desserrer la contrainte budgétaire. En filigrane, l’avantage serait tout aussi politique qu’économique.Problème : cette croissance relèverait surtout du trompe-l’œil, une sorte d’embellie artificiellement dopée. Sans compter qu’en rendant l’argent plus accessible, une diminution des taux provoquerait immanquablement une hausse des prix, et risquerait ainsi de raviver à moyen terme les braises inflationnistes, à peine contenues. C’est d’ailleurs pour garantir une stabilité des prix que la Fed maintient depuis le début de l’année, ses principaux taux stables entre 4,25 % et 4,50 %. Autant dire que les effets indésirables d’une telle manœuvre ne relèvent plus de la simple hypothèse, mais plutôt du scénario largement anticipé.L’indépendance de la Fed mise à l’épreuveDerrière les risques économiques, c’est un principe institutionnel qui vacille. En menaçant de limogeage Jerome Powell, Donald Trump fait fi de la règle d’indépendance de la banque centrale américaine instaurée dans les années quatre-vingt à la suite d’une période de forte inflation dans la décennie précédente. Une indépendance, qui comme le souligne le Washington Post, “protège également le personnel politique de la responsabilité des décisions impopulaires prises (par la Fed) pour lutter contre l’inflation”. Avant lui, aucun autre président des Etats-Unis n’a jamais tenté de dégager un gouverneur de la Fed.L’absence de précédent ne fait d’ailleurs qu’ajouter à la confusion qui entoure une éventuelle révocation de Jerome Powell. Si Donald Trump jure, tous azimuts, détenir les pleins pouvoirs pour le limoger, les juristes, eux, restent divisés. Et pour cause : en coulisses, les dirigeants de la Fed se sont déjà préparés à ce scénario. Dès 2018, ils avaient acté qu’en cas de remise en cause de la légitimité de Jerome Powell par l’administration, le comité chargé des taux, le Federal Open Market Committee (FOMC) se réunirait sans tarder pour le reconduire à la tête de l’institution.Un limogeage qui divise jusque dans le camp TrumpAutrement dit, même écarté officiellement, Jerome Powell resterait aux commandes de la Fed, le temps qu’un éventuel bras de fer judiciaire suive son cours — et cela pourrait bien durer au-delà de la fin de son mandat, en mai 2026. De quoi réduire à néant le rapport coût-bénéfice d’une tentative de destitution. Raison pour laquelle plusieurs membres de l’entourage de Donald Trump plaident en faveur du maintien de Jerome Powell.À commencer par son secrétaire au Trésor, Scott Bessent, qui a réaffirmé cette semaine son attachement à l’indépendance de la première des banques centrales. Kevin Warsh, l’ancien gouverneur de la Fed de 2006 à 2011, que Donald Trump envisage de nommer une fois le mandat de Jerome Powell achevé aurait également tenté de dissuader le républicain de révoquer son successeur. Une façon de se préserver des pressions du chantre de “l’America First” une fois en poste ?
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Author : Ambre Xerri
Publish date : 2025-04-18 14:52:00
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Sunday, April 20