Le 9 mars dernier, les coureurs et spectateurs du semi-marathon de Paris ne pouvaient pas rater son logo. Ses quatre lettres s’affichaient partout : sur l’arche de départ aux côtés d’Harmonie Mutuelle – le sponsor officiel de l’événement -, sur les panneaux jalonnant le parcours, sur les dossards et les t-shirts de l’édition 2025, et jusque sur le ruban de la ligne d’arrivée… Et bien sûr, aux pieds de nombreux “runners” du jour, qu’ils soient professionnels ou amateurs.Pour la première fois de sa jeune histoire, la marque de baskets Hoka était partenaire de la plus grande course au monde dans sa catégorie, de par le nombre de participants – plus de 48 000. Un véritable coup de force pour cette griffe lancée seulement en 2009. Le 13 avril prochain, les rues de la capitale seront de nouveau envahies, cette fois, pour le marathon de Paris. Une nouvelle occasion de faire parler d’elle. En à peine 15 ans, cet ovni a bousculé la pratique en Europe et aux Etats-Unis, elle-même en plein boom. “La belle dynamique du running a débuté en 2015 et s’est accélérée avec la crise du Covid, notamment parce que c’était l’un des rares sports autorisés pendant les confinements. Un véritable écosystème autour des coureurs s’est aussi développé, avec des outils comme les montres connectées et l’équipement technique pour le trail, permettant aux sportifs amateurs de se comparer à de vrais compétiteurs”, développe Hugo Szwaja, directeur chez Nova Conseil.Les débuts de Hoka ne furent pourtant pas un long fleuve tranquille. Lorsque les premiers modèles débarquent dans les magasins spécialisés, la perplexité laisse très vite place à la raillerie. Imaginé au pied des montagnes de Haute-Savoie, à Annecy, par Jean-Luc Diard et Nicolas Mermoud, deux anciens de Salomon, le design de ces chaussures haut de gamme détonne : des couleurs flashy, une semelle très épaisse et ondulée, à rebours de la tendance “minimaliste” recherchée à l’époque, en faveur d’un aspect plus fin et plat… “Les premières fois qu’on les a eus entre les mains, on s’est dit : “Ce n’est pas possible”. Nous étions plutôt sceptiques !”, se remémore Marc Chevillard, président et fondateur de Running Conseil, une coopérative française de 74 magasins spécialistes du running. “On était tous d’accord, elles nous paraissaient totalement différentes de ce qu’on avait l’habitude de voir”, abonde Vincent Bouillard, vainqueur surprise, en 2024, du mythique Ultra Trail du Mont Blanc – 171 kilomètres et 10 000 mètres de dénivelé positif – et qui a signé en mars un contrat de sponsoring avec Hoka, dont il est aussi employé comme ingénieur depuis 2016.L’ultratrailer Vincent Bouillard dévale une montagne avec des Hoka aux pieds.Un démarrage poussifIl faut savoir dépasser sa première impression. “Dès la première journée d’essai, nous avions la sensation de flotter, avec une confiance accrue et une facilité assez déconcertante”, raconte Nicolas Mermoud. Tout le défi était désormais de réussir à faire enfiler leurs paires aux coureurs de trail. Ce ne fut pas une mince affaire. Le déclic viendra de l’autre côté de l’Atlantique, à Austin, lors d’un salon spécialisé. Coup du destin, Nicolas Mermoud tombe nez à nez dès son arrivée avec le propriétaire de Boulder Running Company, une chaîne magasins de référence dans le domaine aux Etats-Unis. “Nous faisions la même pointure, je lui ai passé une paire. Il l’a ensuite montrée à son associé et à des collègues. En une soirée, des personnes extrêmement influentes dans le milieu étaient déjà séduites”, se souvient-il.La machine est lancée. Dans un premier temps, 3 000 chaussures sont produites et distribuées en Europe et aux Etats-Unis. Si les magasins s’en emparent rapidement, convaincre les clients prend plus de temps. “Au début, la fiabilité des chaussures posait problème, avec de nombreux retours en service après-vente. Nous avons essuyé les plâtres”, regrette Marc Chevillard. La marque rectifie le tir et commence à séduire les adeptes du trail. “C’est une discipline exigeante qui s’est révélée un formidable laboratoire : reliefs accidentés, terrains variés, impacts répétés… Les chaussures doivent être d’une technicité irréprochable. C’est une vitrine idéale pour démontrer son savoir-faire”, souligne Virgile Caillet, délégué général de l’Union Sport et Cycle. Faute de moyens pour le marketing, Hoka s’en remet à ses consommateurs pour faire passer le mot. “Tout s’est fait par le bouche-à-oreille : un client essayait les chaussures, les adorait, puis en parlait autour de lui. C’est, au fond, la meilleure publicité possible, rien n’est plus efficace”, assure Tom Nikic, spécialiste du secteur au sein de la banque d’affaires Needham & Company. Les membres de la communauté Hoka sont aujourd’hui ses meilleurs ambassadeurs.Une percée dans le lifestyleEn bousculant les codes avec ses grosses semelles, le petit nouveau entraîne dans son sillage ses concurrents. “Tout le marché a évolué dans cette direction, ajoute le financier. Même des géants comme Nike ont exprimé leur volonté de produire davantage de modèles de ce type.” La suite se transforme en une ascension fulgurante. En 2024, la marque a dégagé un chiffre d’affaires de 1,8 milliard de dollars, dont une majeure partie aux Etats-Unis, contre… moins de 2 millions de dollars en 2012. Une progression accélérée par son rachat en 2013 par le groupe américain Deckers. Car pour passer à la vitesse supérieure, “nous avons décidé de nous appuyer sur un partenaire stratégique”, explique Nicolas Mermoud, qui n’est aujourd’hui plus employé par Hoka, mais garde un rôle de consultant régulier auprès de la marque. Le siège social se trouve désormais en Californie où l’autre cofondateur, Jean-Luc Diard, reste actif. “Le fait d’être rattaché à une entreprise solide et bien gérée a été un vrai plus, salue Tom Nikic. La marque UGG, qui est la locomotive historique de Deckers, était déjà très rentable. Ses bénéfices ont permis de financer la croissance de Hoka”.Le pôle de Recherche et développement, lui, a été maintenu à Annecy, pour rester au plus près des sentiers de montagne. Après avoir conquis le monde du trail, la griffe s’est attaquée à la course sur route. “Salomon a eu du mal à faire cette transition, tandis que Hoka a su relever ce défi”, note Marc Chevillard. A la manière de Decathlon, elle commence aussi à faire une percée dans le lifestyle. “Elle s’inscrit dans la tendance des vêtements techniques utilisés dans la vie quotidienne”, explique le consultant Hugo Szwaja. Plusieurs stars et influenceurs se sont déjà affichés chaussés de Hoka. Le nouveau relais d’un parcours déjà victorieux.
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Author : Thibault Marotte
Publish date : 2025-04-12 10:00:00
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