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A peine né, il avait déjà un nom. Fils de, Jean-Louis Debré a eu l’occasion d’observer dès son enfance les vicissitudes de la nature humaine, et cela a compté pour la suite de l’histoire : à la maison défilaient les responsables politiques de premier plan, son père Michel serait Premier ministre, il serait aussi le père de la Ve République. Petit-fils de, aussi, Robert étant un pédiatre de grande renommée.Pour se faire un prénom, Jean-Louis Debré ne compta pas tout de suite sur les titres glorieux qui avaient été ceux de ses aïeux. Il épousa la destinée d’un homme, Jacques Chirac. Autant dire qu’il a failli rester célibataire… C’est l’histoire d’un voyage devenu une légende. A la fin de 1994, le maire de Paris, candidat à l’élection présidentielle pour la troisième fois, est au plus bas dans les sondages, écrasé par le chef du gouvernement de l’époque, son ami de trente ans Edouard Balladur. Il se rend sur l’île de la Réunion. “Vous savez, je ne sais pas comment on va terminer”, lui glisse Jean-Louis. Chirac : “Mais qu’est-ce que tu feras, toi, si je suis battu ? ” Debré retournera au tribunal exercer son métier de juge. Chirac l’interrompt : “Tu sais, voilà ce qu’on va faire, on va ouvrir une agence de voyages. Tu vas la tenir et moi, je voyagerai !” Silence. “D’ailleurs, si je gagne, je t’offre un voyage au Japon.”Jacques Chirac a gagné, Debré n’a pas gagné de voyage au Japon – les promesses, et avec ce président plus qu’avec tous les autres, n’engagent que ceux qui les croient. Mais Jean-Louis a eu plus et mieux, le poste de ministre de l’Intérieur. Il sera souvent critiqué, parfois moqué. Et alors ? Seul compte à ses yeux le jugement du président, qui un jour a rendu cette sentence définitive : “Tu t’es peut-être trompé, mais tu ne m’as jamais trompé.”Cela s’appelle la fidélité, vertu pas forcément la plus partagée dans le milieu. En son nom, lui qui, racontait-il souvent, avait vu “les courtisans partis courtiser ailleurs, les regards qui se détournent, les mains qui ne se tendent plus”, il resta en soutien de Jacques Chirac. Une fois, lors de cette fameuse campagne présidentielle marquée par un duel fratricide à droite d’une violence inouïe. Deux fois, après que Jacques Chirac fut en quelque sorte macroniste avant l’heure : une dissolution sortie de nulle part et qui amena le chef de l’Etat nulle part. En 1997, la droite est au fond du gouffre, prête à faire la peau à ce Chirac décidément pas à la hauteur. Et Debré demeure, visiteur du dimanche d’un président abandonné par son camp. Qui le reçoit, avec les habitudes d’un vieux célibataire : toujours la même place, où le chef de l’Etat le fait asseoir ; toujours le même scénario, une fausse question puis un long monologue du président. Sauf quand Jacques Chirac a les yeux rivés sur sa télévision. “Je vous laisse Monsieur – c’est ainsi qu’il a toujours appelé Chirac, avant comme après son accession à l’Elysée en 1995.” “Non, regarde avec moi, c’est du sumo !” Le piège parfait…La fidélité trois fois, lorsqu’il fallut repartir au combat, en 2002, dans un match qui paraît ô combien risqué face à Lionel Jospin. Puis vint le temps des honneurs et aussi celui de l’apaisement intérieur – sauf quand il entendait le nom de Sarkozy : président de l’Assemblée nationale, président du Conseil constitutionnel. Puis, plus tard, auteur à succès, comme une ultime revanche pour celui qui avait été si régulièrement brocardé. Depuis ce mardi 4 mars, il a retrouvé et son père, et Jacques Chirac.



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Author : Eric Mandonnet

Publish date : 2025-03-04 08:20:00

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