Des agents fédéraux passés sous les ordres de puissances étrangères ? Un jeu d’ombres qui traverse les siècles. Endetté et mécontent de ne pas être reconnu à sa juste valeur, le général de l’armée continentale Benedict Arnold tente de livrer la forteresse de West Point aux Britanniques lors de la Guerre d’Indépendance américaine. Comment ne pas citer non plus l’exemple d’Aldrich Ames, officier du contre-espionnage de la CIA recruté par les services de renseignements russe dans les années 1980 ? Ou, plus récemment, celui de Kevin Patrick Mallory, un ancien de la CIA devenu les yeux et les oreilles de Pékin en 2017 ?Huit ans plus tard, un rapport du Service d’enquête criminelle de la Marine (NCIS) s’inquiète d’une hausse de recrutement d’agents fédéraux par des puissances étrangères dans les prochains mois. Consulté par CNN, le document estime avec “un haut degré de certitude” que des adversaires étrangers tentent de recruter ces employés fédéraux. D’après les renseignements américains, ces puissances étrangères, parmi lesquelles la Russie et la Chine, seraient tentées de “tirer parti” des licenciements massifs prévus par l’administration Trump et téléguidées par Elon Musk.Le plan d’Elon Musk crée-t-il “un terrain de recrutement idéal” ?Depuis le retour du chantre du MAGA (pour Make America Great Again) à la Maison-Blanche, et la mise en route effective du comité d’efficacité gouvernementale – la “Doge” – pilotée par le patron de X, des dizaines de milliers de fonctionnaires ont été poussés vers la porte de sortie. Fin février, quelque 2 millions d’agents fédéraux ont reçu un courriel leur sommant d’égrainer ce qu’ils et elles avaient fait la semaine dernière. Une absence de réponse équivalait à une démission. A noter que 100 000 d’entre eux ont soit accepté le plan de départ, soit déjà été licenciés à ce jour, selon l’agence de presse américaine Reuters.Pour Holden Triplett, ancien directeur du contre-espionnage au Conseil de sécurité nationale sous la première administration Trump et ancien attaché du FBI aux ambassades américaines de Moscou et Pékin, le gouvernement républicain est “peut-être en train de créer, involontairement, l’environnement de recrutement idéal” pour des puissances étrangères. Et pour cause, “les employés qui se sentent maltraités par leur employeur ont historiquement montré une propension bien plus élevée à divulguer des informations sensibles”, fait-il valoir auprès de nos confrères de CNN.Internet, un atout majeurTémoins, comme le reste du monde, de cet écrémage bureaucratique, la Russie et la Chine sont à l’affût. Ainsi, les deux géants concentrent leurs efforts sur les fonctionnaires récemment licenciés disposant d’une habilitation de sécurité. Les agents en période d’essai sont eux aussi dans le viseur. Souvent vulnérables, ces profils sont depuis longtemps des cibles privilégiées pour les services de renseignement. La CIA elle-même recrute volontiers des employés déçus par des gouvernements adverses, en utilisant des tactiques similaires. “Des turbulences politiques dans votre pays ? Travaillez avec nous pour nous aider à aider votre nation !”, résume à nos confrères de CNN un ancien agent du renseignement en paraphrasant la stratégie américaine.Au temps de la guerre froide et d’Aldrich Ames, les services de renseignement étrangers recouraient à des méthodes telles que l’infiltration dans les institutions, le recrutement par le biais de contacts directs, les manipulations psychologiques, ou encore l’exploitation de vulnérabilités personnelles et financières. Un demi-siècle plus tard, ces derniers disposent d’un atout majeur, bien plus efficace et moins dispendieux : Internet, et plus particulièrement les réseaux sociaux comme LinkedIn, TikTok, RedNote et Reddit. Ainsi, demande-t-on aujourd’hui à un agent du FSB (les services de renseignements russes) ou du MSS (leur équivalent chinois) de publier des offres d’emploi sur LinkedIn en ciblant activement des employés fédéraux américains.Dans les couloirs de l’administration Trump, les mises en garde sont balayées d’un revers de la main. La directrice du renseignement national, Tulsi Gabbard, a récemment accusé les fonctionnaires “déloyaux” d’être la seule menace à la fuite d’informations critiques. “Comment peuvent-ils croire que c’est la bonne manière de garder leur poste”, a-t-elle persiflé sur l’antenne de Fox News fin février. Et de renchérir : “Et ce sont précisément ces individus que nous devons identifier et éliminer, pour que les vrais patriotes qui travaillent dans ce domaine et qui sont engagés dans notre mission puissent se concentrer sur leur tâche”. Ce qui ne répond pas à la question de taille : comment s’assurer que ces fonctionnaires licenciés des agences fédérales ne vendent pas à des puissances étrangères des informations sensibles sur la première puissance mondiale et militaire ?
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Author : Ambre Xerri
Publish date : 2025-03-03 13:48:00
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