Les tests de personnalité et autres profils comportementaux ont envahi le management, en particulier les ressources humaines. Proposés comme des béquilles décisionnelles, notamment lors de recrutements, les MBTI, DISC et autres ennéagrammes sont des gadgets ne reposant sur aucun fondement solide, et s’avèrent, de surcroît peu efficaces. Il faut s’en débarrasser au plus vite. Car toutes les méta-études le confirment, ces tests figurent au rang des plus faibles prédicteurs de performance parmi les outils mobilisés dans un processus de recrutement. Non seulement les modèles théoriques qui les sous-tendent sont friables (C.G. Jung pour le MBTI et Marston pour le DISC), voire délirants (Gurdjieff et son ésotérisme pour l’ennéagramme), mais n’étant pas sérieusement calibrés, ils ne disent à peu près rien de sérieux de la personne qui les subit. Décontextualisés, ils reposent sur des biais cognitifs bien connus, notamment l’effet Barnum.Leurs défenseurs avancent qu’ils ne sont qu’un élément parmi d’autres dans la prise de décision et qu’ils servent avant tout à “entamer une discussion” avec un candidat. Si tel est l’objectif, pourquoi ne pas recourir dans ce cas à l’astrologie, à l'”oomancie” (divination par le blanc d’œuf) ou à la lecture du marc de café ? Pas sûr que l’on obtiendrait de moins bons résultats…Comme l’explique en détail Marie-Sophie Zambeaux dans son dernier livre (Recrutement sous influence. Libérez-vous des biais cognitifs, Dunod, 2025), le recrutement est déjà suffisamment sous l’influence des biais cognitifs pour ne pas avoir à s’infliger un hochet décisionnel qui n’a qu’un seul effet : produire un joli bruit lorsqu’on l’agite dans le bureau d’un manager. Eradiquer ces tests et profils de nos organisations constitue non seulement un geste barrière face au bullshit managérial, mais cela contribue aussi à nous prémunir contre un danger déjà bien présent et bien plus grave encore : l’invasion de l’intelligence artificielle dans les processus de recrutement.MBTI, DISC, ennéagramme et IA : même combat !L’analyse par l’IA des CV et des lettres de motivation afin de détecter les mots-clés et d’opérer un premier tri est une pratique déjà bien ancrée dans nos organisations. L’étape suivante, qui consiste à utiliser des outils vidéo et le son (HireVue, Pymetrics, ModernHire, etc.) pour soi-disant révéler la “vraie personnalité” d’un candidat est déjà en marche. Que ces gadgets n’offrent ni assurance ni fiabilité n’empêche en rien le fait que leur usage soit toujours plus large. Cela doit pourtant nous alerter et nous pousser à exiger l’interdiction pure et simple de ces pratiques dans le recrutement.Pourquoi ? D’abord parce qu’elles renouent avec des pratiques pseudoscientifiques d’un autre âge comme la physiognomonie, et s’appuient sur des joujoux pour le moins fragiles comme l’analyse de la communication non verbale, loin d’être une “science” établie. Ensuite, parce qu’il n’est pas besoin d’être grand clerc pour comprendre le caractère potentiellement discriminatoire de ces pratiques.Les tests et profils personnalité et de comportement partagent avec l’IA de troublantes similarités : une vision essentialiste des individus, une croyance forte en des théories et des modèles qui s’apparentent plus à des pseudosciences qu’à des disciplines sérieuses, ainsi qu’une foi aveugle en la technologie pour résoudre des problèmes et faciliter la prise de décision. Foi qui confine au solutionnisme et nous enferme dans une forme de sottise, oubliant que le recrutement est un jeu d’acteurs où chacun simule et se vend.Notre appétence pour ces tests n’est rien d’autre qu’une servitude volontaire. Elle nous prépare à l’assujettissement que l’intelligence artificielle nous promet. Bannir l’usage des tests et profils comportementaux et de personnalité, c’est aussi refuser notre asservissement progressif à l’IA. MBTI, DISC, ennéagramme et IA : même combat !* Christophe Genoud est intervenant vacataire à la Haute Ecole de Gestion de Genève (HEG) et à la Haute Ecole Spécialisée de Suisse Occidentale (HES-SO) à Lausanne, spécialiste en organisation et auteur de l’ouvrage “Leadership, agilité, bonheur au travail : Bullshit !” (Editions Vuibert).
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Publish date : 2025-02-19 10:58:00
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