* . * . . .
L’Express

François Bayrou à l’Assemblée : ce qu’il faut retenir du discours du Premier ministre

François Bayrou à l’Assemblée : ce qu’il faut retenir du discours du Premier ministre

Le Premier ministre François Bayrou a détaillé face aux députés, durant une heure et demie les grands axes de son projet au cours de son discours de politique générale, ce mardi 14 janvier. Le nouveau gouvernement, qui avance sur le fil, est attendu au tournant, alors que la France insoumise a déjà fait savoir qu’elle déposerait une motion de censure, même si celle-ci n’a aucune chance d’être adoptée sans le soutien du Rassemblement national. Plusieurs axes centraux et sensibles ont été abordés par le chef du gouvernement, depuis la relance du « chantier des retraites » que les syndicats auront trois mois pour rendre plus social, en passant par de nouveaux débats sur les budgets et la réduction des dépenses publiques, la création d’une Banque de la démocratie ou encore la réforme de l’Etat.Si François Bayrou s’appuie durant ce mandat sur les mêmes forces que Michel Barnier – le camp macroniste et la droite -, il a misé sur des négociations serrées avec la gauche, hors La France insoumise (LFI), contrairement à son prédécesseur qui avait tenté de contenter le Rassemblement national sans y parvenir. Lui qui avait annoncé plus tôt dans la journée qu’il n’y aurait « pas de suspension » de la réforme des retraites tend néanmoins la main aux socialistes avec la « remise en chantier » du projet en collaboration avec les partenaires sociaux. Confronté à la mission quasi-impossible de survivre, et faire adopter un budget pour l’année en cours, là où son prédécesseur Michel Barnier a échoué, il s’est montré prudemment optimiste. »On est contraints au courage » »Au risque de vous surprendre, je crois que notre situation est un atout », a débuté avec optimisme et espièglerie le Premier ministre à l’Assemblée nationale. « 84 % des Français jugent paraît-il que le gouvernement ne passera pas l’année. Il m’arrive même de me demander ou les 16 % restants trouvent la source de leur optimisme », a-t-il ironisé. Mais cette position « que pas un ne trouve enviable », « présente un avantage considérable », a avancé le chef du gouvernement. « Parce que quand tout va bien on s’endort sur ses lauriers. Et quand tout paraît aller mal, on est contraints au courage », a-t-il assené. La priorité selon lui : Le besoin, l’exigence, l’injonction que le pays nous assigne de retrouver la stabilité. » Les Français « comprennent bien que nous ne sommes pas d’accord sur tout, mais ils nous enjoignent, je le crois, de joindre nos forces pour forcer les issues », a-t-il affirmé.S’attaquer à l' »épée de Damoclès » du surendettementPremier gros bloc abordé par François Bayrou : le surendettement de la France, qui n’a jamais été aussi endettée depuis la guerre, a-t-il pointé. « Tous les partis de gouvernement, sans exception, ont une responsabilité dans la situation créée ces dernières décennies » a-t-il assuré. « Cette dette est une épée de Damoclès au-dessus de notre pays et de notre modèle social », a ajouté le Premier ministre, en accusant « tous les partis d’opposition » de demander « sans cesse des dépenses supplémentaires », ce qui produit un « tango fatal qui nous a conduits au bord du précipice », a-t-il clamé sous les exclamations des députés d’opposition. »Les prévisions de croissance à la suite en particulier de la crise née du vote de la motion de censure ont toutes été revues à la baisse », a-t-il annoncé. Il a dit viser un déficit public de 5,4 % du PIB en 2025, contre les 5 % escomptés par son prédécesseur, et abaisser la prévision de croissance du gouvernement à 0,9 % cette année contre 1,1 % avant la censure. L’objectif de ramener le déficit en 2029 au maximum de 3 % toléré par la Commission européenne sera maintenu. Pour y parvenir, « des économies importantes seront proposées pour la suite », a souligné François Bayrou, sans les détailler.Adopter au plus vite les budgets de l’EtatAutre priorité, « il faut nous ressaisir pour adopter sans tarder les deux budgets de l’Etat et de la Sécurité sociale », tombés avec la censure le 4 décembre du gouvernement précédent, a affirmé François Bayrou dans sa déclaration de politique générale. « Cette précarité budgétaire, nous la payons tous au prix fort, entreprises, investisseurs, familles, contribuables, emprunteurs », a souligné le Premier ministre, en invitant aussi les forces politiques à « mettre en place les conditions de la stabilité qui impose de se réconcilier, ce dont le pays a tant besoin et que ses citoyens ne cessent de réclamer ».Concernant la fiscalité, il a estimé que les entreprises devaient être « prémunies contre des augmentations exponentielles d’impôts et de charges ». Il ne s’est pas prononcé sur une éventuelle taxe visant les hauts revenus. Le ministre de l’Economie, Eric Lombard, avait indiqué début janvier viser un effort budgétaire de 50 milliards d’euros en 2025, qui s’appuierait principalement sur des économies plutôt que des hausses d’impôts, et sur une taxation des plus riches.Un « conclave » de trois mois pour revoir la réforme des retraitesAu cœur des tractations entre les partis pour la survie du gouvernement, la question extrêmement attendue de la réforme des retraites. François Bayrou a annoncé vouloir « remettre ce sujet en chantier, avec les partenaires sociaux, pour un temps bref », « selon une méthode inédite ».Pour disposer de « chiffres indiscutables », il va demander une « mission flash » de « quelques semaines » à la Cour des comptes. À partir de la remise ce rapport, les partenaires sociaux, qu’il réunira « dès vendredi » au sein d’une « délégation permanente », s’installeront tous « dans les mêmes bureaux » et auront trois mois pour réviser la réforme. « Si au cours de ce conclave, cette délégation trouve un accord d’équilibre et de meilleure justice, nous l’adopterons. Le Parlement en sera saisi lors du prochain projet de loi de financement » de la sécurité sociale à l’automne « ou avant, et si nécessaire par une loi », a promis le dirigeant centriste. Sinon, c’est « la réforme actuelle qui continuerait à s’appliquer ».L’allié historique d’Emmanuel Macron n’a donc pas évoqué de « suspension » formelle du texte de 2023 – une demande des socialistes qui hérissait une partie du camp présidentiel et de la droite. Il a estimé qu’une « fenêtre de tir » s’ouvrait sans nécessiter de pause, puisque la loi « a prévu que l’âge légal de départ passerait à 63 ans fin 2026 ». Il a assuré n’avoir « aucun tabou, pas même l’âge ». La « seule exigence » : ne pas « dégrader l’équilibre financier », et donc trouver d’autres pistes de financement.Réformer l’Etat pour réduire ses dépensesLe Premier ministre a annoncé la création d’un fonds spécial « entièrement dédié à la réforme de l’État », estimant que les « 1 000 agences ou organes de l »Etat » actuels constituent « un labyrinthe dont un pays rigoureux peut difficilement se satisfaire ». Ce fonds sera financé par des actifs « en particulier immobiliers, qui appartiennent à la puissance publique de façon à pouvoir investir, par exemple dans le déploiement de l’intelligence artificielle dans nos services publics », a-t-il déclaré. Agriculture : remise en question des normesLe Premier ministre a mené une charge contre les contrôles et les normes environnementales auxquels les agriculteurs sont soumis, allant jusqu’à qualifier de « faute » les inspections « avec une arme » de l’Office français de la biodiversité. « Je m’engage […] à ce que nous remettions en question les pyramides de normes en donnant l’initiative aux usagers. Ceux que l’on contrôle doivent avoir leur mot à dire sur les contrôles », a-t-il déclaré au lendemain d’une rencontre avec les principaux syndicats agricoles, remontés après un an de mobilisation. Mettant en avant ses racines paysannes, il a distingué dans son discours « la crise » provoquée selon lui par deux facteurs : le manque de revenus et le « sentiment qu’ont nos agriculteurs de n’être pas respectés », reprenant à son compte le mécontentement des agriculteurs face aux critiques des écologistes, notamment concernant l’usage des pesticides et le partage de l’eau.Face aux syndicats agricoles, il a repris les engagements des précédents gouvernements (près de 500 millions d’euros d’allègements fiscaux, d’allègements de charges, retraites…) et affirmé que nombre d’exigences formulées par les agriculteurs trouveraient leur réponse dans la loi d’orientation agricole, qui sera examiné au Sénat à partir du 4 février.La proportionnelle remise sur la tableFrançois Bayrou a proposé d’avancer « sur la réforme du mode de scrutin législatif », avec « un principe de proportionnelle », soulignant qu’il devra « être enraciné dans les territoires ». Cette réforme, « probablement », « nous obligera à reposer en même temps la question de l’exercice simultané d’une responsabilité locale et nationale », a ajouté le Premier ministre, suscitant la protestation de nombreux députés à gauche, plus de dix ans après la suppression du cumul des mandats lors de la présidence de François Hollande.Création d’une Banque de la démocratieLe Premier ministre a aussi relancé l’idée de créer une « banque de la démocratie » pour que les partis politiques puissent se financer auprès d' »organismes publics » et pas seulement privés. Souhaitant que les partis « puissent se financer sans avoir besoin de passer par des stratégies de contournement », le Premier ministre a dit vouloir « la création d’une banque de la démocratie pour que le financement des partis politiques et des campagnes ne dépende plus de choix de banques privées, mais puisse éventuellement et en recours, être le fait d’organismes publics placés sous le contrôle du Parlement ». « L’argent ne doit pas diriger les consciences et l’argent ne doit pas prendre le pas sur la libre volonté des citoyens », a-t-il fait valoir. Gilets jaunes : « Reprendre l’étude des cahiers de doléances » Le gouvernement souhaite « reprendre l’étude des cahiers de doléances » rédigés à l’issue des débats qui avaient suivi les manifestations des « gilets jaunes », un mouvement « négligé » selon le chef du gouvernement. Les « gilets jaunes » ont « dénoncé l’état qu’ils ressentaient de notre société », « la division du pays entre ceux qui comptent et ceux qui ne comptent pas », mais « la promesse française suppose que nous puissions abattre le mur qui existe entre les uns et les autres », a affirmé le Premier ministre dans sa déclaration de politique générale. « C’est la raison pour laquelle nous devrons reprendre l’étude des cahiers de doléances », afin que « s’expriment dans notre société […] les attentes souvent les plus inexprimées, qui sont celles des milieux sociaux exclus du pouvoir ».Education : « Parcoursup est une question » »Parcoursup est une question », a-t-il déclaré, en estimant nécessaire d' »ouvrir les portes » et d' »inventer la période de l’année d’articulation entre l’enseignement secondaire et l’enseignement supérieur », lors de sa déclaration de politique générale. « Vouloir sélectionner précocement, sans qu’aient mûri l’esprit et les attentes, je pense que c’est une erreur, en tout cas une faiblesse », a estimé devant l’Assemblée nationale le chef du gouvernement, critiquant en creux la plateforme post-bac d’orientation lancée en 2018.Santé : pas de déremboursement des médicamentsEnvisagée à l’automne par Michel Barnier puis abandonnée sous la pression du RN, « la mesure de déremboursement de certains médicaments et de consultations » médicales « ne sera pas reprise », a annoncé mardi le Premier ministre François Bayrou. A rebours de ces pistes d’économies, « le gouvernement proposera une hausse notable » des dépenses de santé afin « d’améliorer les conditions de travail des soignants et de protéger les plus fragiles », a affirmé François Bayrou, confirmant au passage « le remboursement intégral des fauteuils roulants dès 2025 », promesse formulée par Emmanuel Macron il y a bientôt deux ans.Fin de vie : Bayrou croit au « pouvoir d’initiative » du ParlementLe Premier ministre a très brièvement évoqué la fin de vie, pour renvoyer au « pouvoir d’initiative » du Parlement sur de tels « sujets importants dans notre société ». Jugeant qu’une « promesse de la Ve République » est de « concilier la capacité d’action de l’Etat et le pluralisme » et que « cette capacité d’action de l’Etat passe par une coopération entre les pouvoirs ». Il a déclaré que « le Parlement a de ce point de vue des prérogatives qui doivent être pleinement respectées ». Plutôt que de relancer les travaux parlementaires via un projet de loi, c’est la proposition de loi du député Olivier Falorni (groupe MoDem) – reprise du texte issu des débats du printemps – qui sera la base de discussions. Quelques heures plus tôt, la présidente de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, très allante sur ce sujet, avait demandé au gouvernement que le texte sur la fin de vie soit examiné à partir du 3 février, comme s’y était engagé le gouvernement Barnier.Les dossiers de la Corse et de la Nouvelle-CalédonieFrançois Bayrou a promis de « respecter » le calendrier « pour aboutir à une évolution constitutionnelle fin 2025 » pour la Corse. Le processus dit de Beauvau, visant à accorder davantage d’autonomie à la Corse, avait été initié en 2022 par Gérald Darmanin, alors ministre de l’Intérieur, à la demande d’Emmanuel Macron. Mais la dissolution de l’Assemblée nationale en juin 2024 a mis brutalement un terme aux discussions, laissant de nombreux élus corses craindre l’abandon du projet.Il a par ailleurs annoncé qu’il inviterait en janvier « les forces politiques » de Nouvelle-Calédonie à ouvrir des négociations à Paris « qui devront aboutir à la fin de ce trimestre ». L’adoption par l’Assemblée nationale d’une réforme très controversée du corps électoral calédonien avait déclenché des émeutes massives en mai, qui « ont plongé ce territoire dans un profond marasme », a rappelé le Premier ministre, souhaitant la reprise du « processus politique » sous la houlette du ministre des Outre-mer Manuel Valls.La réforme de l’audiovisuel va se poursuivreLa réforme de l’audiovisuel public « devra être conduite à son terme ». Une proposition de loi prévoyant la création d’une holding, France Médias, composée de quatre filiales, France Télévisions, Radio France, France Médias Monde (FMM) ainsi que l’Institut national de l’audiovisuel (Ina), aurait dû être examinée en décembre, avant la chute du gouvernement de Michel Barnier. La réforme avait été poussée par la ministre de la Culture dès son arrivée au gouvernement, il y a un an. Rachida Dati appelait même de ses vœux une fusion des entreprises de l’audiovisuel public mais le projet avait été suspendu une première fois par la dissolution de l’Assemblée nationale à l’été. « La démocratie suppose un accès à une information fiable. Les conclusions des Etats généraux de l’information lancés par le président de la République devront être traduites » dans les faits, s’est aussi engagé François Bayrou. Ces Etats généraux, large réflexion de près d’un an menée par les professionnels, ont débouché en septembre dernier sur quinze propositions, comme la sensibilisation à grande échelle à la désinformation, la protection renforcée des sources des journalistes, et encore le renforcement de l’indépendance des rédactions.



Source link : https://www.lexpress.fr/politique/francois-bayrou-a-lassemblee-ce-quil-faut-retenir-du-discours-du-premier-ministre-TJKKTZDDEBHBRCN74SD5C7YX2Y/

Author : Enola Richet

Publish date : 2025-01-14 17:08:00

Copyright for syndicated content belongs to the linked Source.

Tags : L’Express
Quitter la version mobile

. * . * . * . * . . . . . . . . , , , , , , , , | | | | | | | | | | | | | | | | | | | | ] ] ] ] ] ] ] ] ] ] ] ] ] ] ] ] ] ] ] ] [ [ [ [ [ [ [ [ [ [ [ [ [ [ [ [ [ [ [ [ | | | | | | | | | | | | | | | | | | | |