Depuis Bruxelles, Rima Hassan a pris un vol à destination de Tel-Aviv le 24 février. Son arrivée était prévue à 15h15. Le ministère de l’Intérieur israélien a décidé de refuser l’entrée à la députée européenne LFI. “Selon la loi en Israël, c’est le pouvoir de l’État de décider qui peut entrer dans le pays et qui ne peut pas. Comme en France et dans tous les autres pays” déclare Sabine Haddad, porte-parole de l’Autorité de l’État civil et de l’immigration, à L’Express. Ce déplacement très médiatisé soulève la question des raisons pour lesquelles Rima Hassan a choisi de se rendre dans un pays qu’elle ne reconnaît pas, à un moment où la région connaît un véritable tournant vers la paix entre Israël et ses voisins.Le seul lien qui unit Rima Hassan à ce territoire est celui de ses grands-parents paternels, ils ont quitté leur village après la Nakba en 1948 pour s’installer en Syrie. Ce pays n’est pour elle qu’une utopie sur laquelle la députée européenne de LFI investit : “Au nom de quoi ne pourrais-je pas retourner dans le village de mes grands-parents ?” s’est-elle interrogée en 2023 dans l’émission C ce soir.En réalité, Rima Hassan pouvait s’y rendre et y circuler grâce à son passeport européen, comme beaucoup de Palestiniens l’ont fait. Mais elle a choisi de s’engager en appelant à “une résistance armée” contre l’existence-même de l’État hébreu, considérant le massacre perpétré par le Hamas le 7 octobre comme une défense légitime. Parallèlement, la même année, elle a effectué un autre voyage, en cohérence avec ses propos, en Syrie, sous la dictature de Bachar el-Assad. Rima Hassan a justifié ce déplacement pour être “proche de son peuple”, comme elle l’a déclaré sur Al-Jazeera arabe. La députée affirmait alors ne plus se sentir en sécurité en France, après avoir reçu des menaces de mort en raison de son soutien à la cause palestinienne. Mais était-elle réellement plus en sécurité dans son quartier de naissance, Neirab, alors contrôlé d’une main de fer par les services de renseignement d’Assad ?Voyager en Israël, longtemps un crime impardonnable pour un ArabeÀ la suite de la chute du régime, je suis revenu dans ma Syrie natale après treize ans d’éloignement. Se retrouver dans un pays sans Assad était un véritable rêve. J’ai eu besoin de temps pour réaliser que j’étais vraiment dans les rues de ma jeunesse, celles des premières manifestations contre le dictateur, et avec ma propre famille que je n’avais pas vue depuis 2012. Parmi les sujets abordés lors de ce retour, il y a eu celui d’Israël. Dans le milieu intellectuel, certaines voix affirment désormais en Syrie que l’État juif est une réalité, qu’il faut normaliser les relations avec lui et qu’il est temps d’arrêter cette guerre absurde. Mais dans les milieux djihadistes, l’appel à libérer la mosquée Al-Aqsa est extrêmement présent. Les islamistes en Syrie considèrent la victoire contre Assad comme le début de la vraie victoire contre les Juifs. “Patience, patience, juifs, l’armée de Mahomet arrivera”, répétait un religieux lors d’une manifestation le jour même de la chute d’Assad.Cette position est de plus en plus dominante, surtout après l’invasion par Israël du sud de la Syrie. Le gouvernement de Benyamin Netanyahou a approuvé à l’unanimité la décision d’occuper la zone tampon et les points de surveillance du Golan, à quelques kilomètres de la frontière israélienne. De son côté, l’autorité syrienne ne réagit à aucune de ces actions, ce qui est considéré comme le début d’une normalisation des relations avec Israël, surtout après avoir gardé le silence sur la visite du journaliste israélien Itai Anghel. Le 21 février, ce dernier a publié une photo de lui en train de fumer la chicha dans un café historique à Damas. Cette visite à a soulevé une vive polémique sur la manière dont il est entré en Syrie, compte tenu des relations tendues entre les deux pays.A l’inverse, voyager en Israël, quand on est originaire d’un pays arabe, a longtemps été un crime impardonnable. Même dotés d’un passeport européen, ceux qui le faisaient se montraient discrets sur ce trajet afin de ne pas être traités de traîtres. Mais depuis 2020, année où les accords d’Abraham ont normalisé les relations diplomatiques entre Israël et plusieurs pays arabes, dont les Émirats arabes unis et Bahreïn, les ressortissants de ces pays remplissent de plus en plus les avions à destination de Tel-Aviv, ville de diversité culturelle, de tourisme et de séduction.Victime vedette de la cause palestinienneCe ne sont sûrement pas ces raisons qui ont motivé Rima Hassan pour prendre un vol à destination de l’aéroport Ben Gourion. Elle savait qu’après toutes ses déclarations haines à l’encontre d’Israël, elle serait inévitablement refoulée. C’était là bien l’objectif de la députée de la France Insoumise. La tragédie entre Israël et le Hamas est en train d’être clôturée, un cessez-le-feu est en place, des otages sont de retour à la maison et les manifestations contre le “génocide” dénoncé par LFI ont perdu en popularité sur le territoire français. Pour Rima Hassan, il fallait tenter autre chose afin de se mettre en scène en victime vedette de la cause palestinienne : se faire refuser l’entrée dans sa Palestine historique. “Au plaisir de ne plus jamais vous revoir”, a-t-elle répondu aux douaniers de l’aéroport de Ben Gourion avant de prendre l’avion de retour à Bruxelles, qui a décollé à 16h10. C’est un plaisir, sans doute, partagé par tous les Israéliens, juifs et arabes, qui ne souhaitent que vivre en paix.* Ecrivain et poète né à Damas, Omar Youssef Souleimane a participé aux manifestations contre le régime de Bachar el-Assad, mais, traqué par les services secrets, a dû fuir la Syrie en 2012. Réfugié en France, il a publié chez Flammarion Le Petit Terroriste, Le Dernier Syrien, Une chambre en exil et Etre Français.
Source link : https://www.lexpress.fr/idees-et-debats/rima-hassan-refoulee-disrael-la-mise-en-scene-de-la-victimisation-par-omar-youssef-souleimane-RH54AKHW7VFRZC3N5GIJKAERAM/
Author :
Publish date : 2025-02-25 07:50:00
Copyright for syndicated content belongs to the linked Source.
Rima Hassan refoulée d’Israël : la mise en scène de la victimisation, par Omar Youssef Souleimane
