Il y a les pour et les contre. Bien que l’intégration obligatoire du non-coté dans l’assurance-vie ait été imposée en octobre dernier par la loi Industrie verte, certains professionnels hésitent encore à proposer ce type de placements à tout un chacun, estimant qu’il est destiné à une clientèle patrimoniale et avertie. “Les produits non cotés apportent de la diversification dans un patrimoine, mais ils ne doivent pas constituer le premier investissement d’un souscripteur, soutient Eric Muller-Borle, président de la fédération Fapes. Il faut d’abord se doter d’un portefeuille composé de fonds en euros, de différentes unités de compte cotées et de produits structurés avant d’aller chercher un surplus de performance dans le non-coté.”Le terme recouvre toutefois une palette étendue de supports d’investissement, incluant le capital investissement (ou private equity), qui consiste à investir dans des entreprises non cotées en Bourse à divers stades de développement ; la dette privée, qui relève du prêt ; ou encore le financement d’infrastructures (en dette ou capital) telles que des ports, des centres de données, des éoliennes, etc. De grands acteurs français ont déjà lancé leurs unités de compte et ce marché attire aussi des acteurs internationaux.Pas de fluctuations brutales du marchéDepuis la loi Macron de 2015, ces supports, autrefois réservés aux grandes fortunes, se sont progressivement ouverts au grand public, notamment via l’assurance-vie. Depuis l’an dernier, les établissements doivent même proposer une gestion pilotée incluant une part minimale de ces produits. Il est vrai que ceux-ci présentent plusieurs atouts. Tout d’abord, ils permettent d’accéder à une catégorie d’entreprises absente des marchés financiers. De plus, ces placements n’étant pas valorisés quotidiennement, ils vous préservent des angoisses liées aux fluctuations parfois brutales des cours de Bourse même si le risque d’investissement demeure – il n’existe aucune garantie sur le prix de revente. Enfin et surtout, le non coté offre un potentiel de gain attrayant. D’après France Invest, il a rapporté 13,3 % par an en moyenne sur les dix dernières années. La dette privée, elle, affiche une rentabilité un peu moindre, autour de 9 %.L’offre s’est progressivement enrichie, car les particuliers représentent une nouvelle manne pour les gérants d’actifs. Toutefois, pour réussir un bon investissement, il convient de rester vigilant et de ne pas céder aux promesses séduisantes de certains acteurs. Il est notamment essentiel de s’interroger sur le contenu du fonds : dans quoi investit-il ? S’agit-il d’un fonds centré sur des entreprises françaises, européennes ou internationales ? S’agit-il de dette, de capital ou d’une combinaison d’instruments ? Le fonds cible-t-il des start-up ou des sociétés en phase de transmission ? Suit-il une thématique particulière ou se concentre-t-il sur des secteurs spécifiques ?”Pour débuter, nous conseillons à nos clients de privilégier une stratégie de capital développement qui investit dans des sociétés matures et rentables, avec un potentiel de développement que le fonds va accompagner, recommande Souleymane-Jean Galadima, directeur général du multi-family office Sapians. Pour les clients déjà exposés au private equity en direct, mieux vaut rechercher une exposition internationale, source de diversification.” Il est également essentiel de se renseigner sur la société de gestion, de connaître son ancienneté, sa spécialité, etc. Les assureurs privilégient généralement des produits issus de sociétés de gestion reconnues et fiables.Différencier assurance-vie et private equity en directLa plupart des fonds proposés en assurance-vie sont dits perpétuels ou evergreen, c’est-à-dire qu’ils n’ont pas de durée d”existence prédéterminée, mais prévoient des portes de sortie régulières permettant aux souscripteurs de récupérer leur épargne. Cela implique souvent une part importante de liquidités, de l’ordre de 30 %, ce qui réduit mécaniquement la performance. S’ajoutent aussi les frais du produit, plus élevés pour le grand public, et ceux de l’enveloppe assurantielle.Par ailleurs, la collecte n’est pas toujours investie immédiatement, mais progressivement, selon les opportunités. Pendant ce temps, l’argent investi rapporte peu. “En fin de compte, on promet aux clients des rendements à deux chiffres, mais la performance en assurance-vie ne correspondra pas à celle du non coté en direct, prévient Jean-Olivier Ousset, conseiller en gestion de patrimoine à Toulouse. Il vaut mieux tabler sur 5 à 7 % par an en moyenne.” Selon une étude de février 2025 du cabinet Good Value for Money, les performances passées des fonds evergreen commercialisés en assurance-vie sur cinq ans atteignent en moyenne 5,01 %, avant frais du contrat. Un niveau proche de la moyenne des marchés actions sur la même période, selon le cabinet, mais qui comporte des écarts significatifs entre la performance la moins bonne (-2,4 %) et la meilleure (15,4 %). Il convient toutefois de noter que l’offre est hétérogène et s’est beaucoup étoffée ces dernières années, laissant espérer des gains plus solides.L’horizon d’investissement dans ces fonds dits “evergreen” varie de 5 à 8 ans.En contrepartie, l’assureur garantit la liquidité. Cela signifie que, si vous souhaitez récupérer votre épargne, l’établissement doit vous la verser dans un délai maximal de deux mois en cas de clôture du contrat. Un avantage de taille alors que le sous-jacent – les entreprises dans lesquelles le fonds a investi – est intrinsèquement peu liquide.Si vous souhaitez réaliser un arbitrage d’une unité de compte vers une autre, les règles peuvent toutefois différer d’un assureur à l’autre. Il est crucial de bien vérifier les conditions contractuelles : des pénalités de sortie anticipée peuvent être prévues pendant plusieurs années ou bien le montant des retraits peut être plafonné. “Les fonds non cotés sont par nature illiquides, rappelle Souleymane-Jean Galadima. Même au sein d’un contrat d’assurance-vie, en cas de rachat massif, il est donc essentiel d’adopter un horizon d’investissement de long terme.” Pour limiter le risque de voir son épargne bloquée, il est préférable d’opter pour des supports de dette privée. Ces derniers percevant des intérêts payés par les entreprises financées, ils peuvent plus facilement faire face à des demandes de retraits.Des frais élevés pour les particuliersIl faut aussi se montrer vigilant sur les frais, les professionnels étant susceptibles d’avoir la main lourde dès lors qu’ils s’adressent à une clientèle de particuliers. “C’est le principal facteur qui obère la performance, rappelle Souleymane-Jean Galadima. Certaines unités de compte sont construites comme des fonds de fonds ; il faut donc étudier soigneusement toute la structure de frais jusqu’aux participations dans les entreprises.” Pour un fonds commun de placement à risque (FCPR), format le plus courant, les frais de gestion ne devraient pas dépasser 2,5 % par an. Il faut aussi prêter attention aux commissions de surperformance, prélevées quand le gérant dépasse son objectif. Ces dernières ne doivent pas se révéler excessives et leur déclenchement doit rester cohérent avec l’objectif affiché.In fine, la performance reste le juge de paix. Pour attirer les épargnants et s’installer durablement sur le marché de l’assurance-vie, les fonds perpétuels devront montrer des historiques convaincants, comme celui de l’unité de compte la plus importante actuellement, Eurazeo Private Value Europe 3. Créé en 2018 et géré par Eurazeo, ce fonds investissant dans la dette privée (60 % de son allocation totale) et dans des stratégies de private equity (40 %) affiche un gain annualisé de 6,70 % sur les cinq dernières années. De nombreuses sociétés de gestion cherchent désormais à contester cette position dominante.Un article de notre dossier “spécial Placements”, publié le 24 avril.
Source link : https://www.lexpress.fr/argent/placements/assurance-vie-comment-investir-dans-le-non-cote-EQRUWO2GPNHPXGRG3NIQDO45DE/
Author : Aurélie Fardeau
Publish date : 2025-04-25 06:30:00
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