Avril 2025 : Donald Trump lance une guerre commerciale tous azimuts avec des tarifs douaniers massifs avant de se raviser, ramenant à 10 % les taxes à l’importation pour une durée de 90 jours, à l’exception de celles qui frappent la Chine. Les marchés en profitent pour souffler après avoir sévèrement piqué du nez, mais l’ordre commercial multilatéral est bien mort. D’aucuns soupçonnent le président américain de manipuler les cours de bourse et de vouloir in fine remettre aussi en cause l’ordre financier international ouvert à Bretton Woods en 1944, pour résoudre le casse-tête de l’immense dette américaine. Quelles conséquences sur le système énergétique international ?Premier constat : que ceux qui sont allergiques à l’instabilité et à la volatilité des prix sortent de la pièce. Chacun va jouer sa partition. L’Opep avait d’ailleurs anticipé la décision américaine : dès le 3 avril, Riyad, comprenant que le risque de récession ouvert par les droits de douane risque fort de se traduire par une baisse de la demande de pétrole, a décidé d’augmenter sa production de 411 000 barils par jour pour sauver ses parts de marché. Le perdant direct ? La Russie. Une baisse forte et durable des prix du pétrole affaiblit Moscou plus que ne le feront toutes les sanctions : bonne nouvelle pour l’Ukraine. En revanche, un prix du baril durablement faible, c’est un nouveau coup dur pour les politiques de neutralité carbone, déjà en péril depuis la fin de l’argent gratuit et la hausse des taux d’intérêt.Un accélérateur de transition ?Faut-il pour autant sonner le glas de la transition énergétique ? Dans un rapport très instructif, The New Joule Order, la société d’investissement américaine Carlyle propose une lecture intéressante de ce qui se joue aujourd’hui sur la scène énergétique mondiale. Oui, l’ère du Net Zero 2050, portée par des taux à zéro et des rêves verts, est révolue. Place à la sécurité énergétique, nouvelle obsession des nations.Est-ce pour autant la fin de la transition ? Pas du tout, répondent les experts de Carlyle, qui rappellent un fait curieusement oublié dans le débat énergétique : la précédente ère de la sécurité énergétique ouverte par le choc pétrolier de 1973 a, en vingt ans, plus fait pour réduire la part des combustibles fossiles – de 94 % à 85 % de la consommation totale en joules entre 1973 et 1993 – que dix années de politique « zéro émission nette » qui, entre 2014 et 2024, ne l’ont réduite que de 85 % à 81 %.Se protéger des soubresauts géopolitiquesEn quoi cette deuxième ère de la sécurité énergétique pourrait-elle aussi accélérer la transition ? Le raisonnement est le suivant. Les Etats-Unis, redevenus exportateurs nets de pétrole grâce à la révolution du schiste, n’ont plus d’intérêt à jouer les gendarmes des mers. Bretton Woods, ce système où le dollar, la Navy et le pétrole formaient une sainte trinité, s’effrite. La preuve ? La Chine, premier acheteur mondial de gaz naturel liquéfié, n’a pas importé de GNL américain depuis soixante jours, ce qui représente la plus longue interruption depuis cinq ans.Il est plus que probable qu’elle va renforcer sa stratégie fondée sur le nucléaire, les renouvelables et le charbon, qu’elle possède en abondance sous les pieds, pour s’affranchir des routes maritimes vulnérables. Le rapport assène une hypothèse audacieuse : les énergies fossiles ne disparaîtront pas – oubliez le pic pétrolier cher à certains… – mais leur commerce va sérieusement se réduire. Bienvenue à “Peak Oil Trade”. L’Opep +, avec l’Arabie saoudite en fer de lance, l’a compris. Les nations paieront cher pour des énergies locales – nucléaire, renouvelables – moins exposées aux caprices géopolitiques. C’est ni plus, ni moins ce qu’a fait la France entre 1973 et 1993, agissant, non pour le climat, mais pour son indépendance.Les nations paieront cher pour des énergies localesNous assistons à la fin d’un monde. Bretton Woods, qui a fait du pétrole le sang de la globalisation, agonise sous les coups de boutoir d’un Trump isolationniste et d’une Opep prête à tout. L’heure n’est plus à la révolution verte, mais à la realpolitik énergétique où la sécurité l’emporte sur le climat… qui pourrait être le gagnant collatéral de ce nouvel ordre mondial. Et Trump, l’ingénieur du chaos énergétique, pourrait se révéler le Monsieur Jourdain de la transition bas-carbone.
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Author : Cécile Maisonneuve
Publish date : 2025-04-11 03:56:00
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