Il a les oreilles qui sifflent parce qu’il n’a pas su tenir sa langue. Laurent Wauquiez est absent du petit déjeuner du socle commun, mardi 8 avril à Matignon, mais il en est un temps le personnage principal. Car François Bayrou n’est pas content. La rencontre de la semaine précédente lui reste en travers de la gorge. Le 1er avril, c’est un requin que le Premier ministre a en face de lui, pas un petit poisson. Lui se réjouit des bons résultats du socle commun dans la législative partielle dans le Jura quand le postulant à la présidence des Républicains l’interrompt : “Non, non, c’est la candidate LR qui a obtenu un bon résultat.” François Bayrou : “Oui, elle est soutenue par le socle commun.” Laurent Wauquiez : “Oui, la candidate LR heureusement soutenue par le socle commun.”Ce jour-là, l’ancien ministre de Nicolas Sarkozy tire tous azimuts. Quand le gouvernement va-t-il inscrire la proposition de loi sur le voile dans le sport à l’ordre du jour de l’Assemblée ? Que fait le gouvernement sur l’Algérie ? Quelle est la stratégie sur les ZFE (zones à faible émission) ? Le pire est à venir. La réunion est à peine terminée que les participants reçoivent des SMS. Y aurait-il une embrouille sur la position du gouvernement à propos du voile dans le sport ? François Bayrou ne va pas apprécier les fuites. “Il ne se passe pas une minute avant que Wauquiez ne mente à la terre entière”, tonne un proche du chef du gouvernement. Oubliant un peu vite les tergiversations du Béarnais sur le sujet.Une semaine plus tard, le Premier ministre tape donc du poing sur la table. La veille, certains lui ont carrément conseillé d’imiter ce qui se passe à l’Elysée pour les conseils des ministres et de demander à tous les participants de laisser leur téléphone portable dans un casier avant le début des échanges. La confiance règne ! Sans aller jusque-là, il insiste : ce qui se dit dans ces entretiens du mardi doit demeurer privé. Cette fois, Laurent Wauquiez saura rester d’une totale discrétion : il n’est pas là…Le parti de droite compte sept ministres dans le gouvernement. Jusqu’où le candidat à la tête de LR est-il prêt à aller dans les quelque cinq semaines qui vont jusqu’à l’élection du nouveau président ? Plus les jours passent, plus l’attelage tangue. Lundi, sur Sud Radio, il muscle encore ses propos après la reprise du dialogue entre Paris et Alger, pour mieux viser par ricochet son rival Bruno Retailleau, qui s’est beaucoup exprimé sur le sujet : “C’est une honte, une humiliation. La France a accepté de capituler.” Evidemment, les ministres LR sont tentés de regarder ailleurs… pour ne pas trop entendre. Mardi, c’est dans Le Figaro que les deux rivaux échangent des amabilités, amenant un membre du gouvernement à tenter d’agiter le drapeau blanc. Sous la forme d’un SMS envoyé à chacun : “Je vous rappelle qu’il y aura un jour d’après.”Comprenez-le. Lui, si longtemps présenté comme héritier naturel du trône LR, est désormais challenger d’un duel incertain. Ses attaques contre le gouvernement relèvent de l’instinct de survie. S’en dispenser, c’est se condamner. Quel autre angle d’attaque dispose-t-il face au chouchou des sondages ? “Tout le parti a accepté la stratégie de la participation au gouvernement, lui mène une stratégie personnelle”, maugrée l’un des représentants LR au gouvernement.Un ministre LR, après sa nomination, avait voulu apaiser l’ambiance : “Quand la droite réussit, c’est bon pour la droite. Ce qui est bon pour la droite est bon pour toi”, avait-il tenté d’expliquer à Laurent Wauquiez.Tollé sur les OQTFLe sujet est clos ? Tout l’inverse. Ce qui est bon pour la droite est en ce moment bon pour Bruno Retailleau. Le cercle vertueux est devenu vicieux. Alors, le camp Wauquiez joue l’éternel insatisfait. Le débat sur la participation de la droite au gouvernement n’aurait pas été tranché avec la nomination de Michel Barnier. Non, il serait permanent et soumis aux circonstances politiques. “Ce débat serait moins intense si on changeait les choses au gouvernement. Là ce n’est pas spectaculaire, note un proche du Ponot. Or si les gens pensent qu’il ne se passe pas grand-chose avec la droite au gouvernement, par association d’idées ils se diront qu’il ne se passe pas grand-chose avec la droite.” Laurent Wauquiez s’est ici trouvé un allié objectif : il s’appelle François Bayrou. L’impopularité du Béarnais à droite et son goût (très) modéré pour la réforme braquent les députés LR et nourrissent l’offensive du député de Haute-Loire.Cette dernière ne s’embarrasse pas de nuances. Il se prononce mercredi dans un entretien au JDNews pour l’enfermement à Saint-Pierre-et-Miquelon des étrangers dangereux sous OQTF qui refusent de retourner dans leur pays – un sujet qui concerne directement le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau. “A proximité du Canada, il fait cinq degrés de moyenne pendant l’année, il y a 146 jours de pluie et de neige. Je pense qu’assez rapidement, ça va amener tout le monde à réfléchir.” La météo, nouvel agent de la politique migratoire. Prière de ne pas s’indigner… ou d’exploser de rire. La manœuvre est cousue de fil blanc. Ici, des tweets indignés de députés EPR. Là, un communiqué scandalisé du ministre des Outre-mer Manuel Valls. Parfait, Laurent Wauquiez a eu tout loisir de se distinguer ce mardi de cette “cohorte des bien-pensants qui vont trouver toutes les bonnes raisons pour que rien ne change.”.L’indignation est son carburant. Une députée Renaissance sourit : “C’est conçu pour faire réagir, mais c’est tellement grotesque. Franchement, j’ai la flemme. En être réduit à sortir ce genre de c… dans le sprint final d’une élection interne, c’est que le mec n’est pas serein. Cela ne suscite chez moi que du mépris.” Un député LR confirme : “La méthode Sarkozy. Je crée une polémique pour faire parler de moi. Mais là, il va faire rire.” Seuls peut-être les adhérents LR seront-ils sensibles, entre deux sourires, à cet appel du grand froid.Laurent Wauquiez attaque. François Bayrou encaisse. A Matignon, on observe avec sérénité les critiques de l’ancien ministre. Un homme isolé n’est pas bien dangereux, même si son groupe parlementaire ne porte pas le Premier ministre dans son cœur. “Il y avait un risque que LR durcisse ses positions, mais ses amis ont vu les sondages, constate un fidèle du Premier ministre. L’autre fait 4 ou 5 % à la présidentielle ! Il est dur car il est en perdition.”La compétition interne à la droite ne sera pas le seul motif de crispation dans les prochaines semaines. La situation financière dans un contexte international tendu, avec les risques récessifs qui l’accompagnent, pèsera fortement. Le 21 janvier, lors d’une réunion du socle commun, François Bayrou avait déjà appelé les groupes à être attentifs dans leurs propositions d’économies. Laurent Wauquiez avait aussitôt dégainé : “Les plus grosses dépenses sont les concessions faites aux socialistes !” Mais quand il s’agira de négocier le budget 2026, qui tiendra les manettes de LR ?
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Author : Eric Mandonnet, Paul Chaulet
Publish date : 2025-04-09 04:15:00
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