Le Brexit est en train de s’effacer de la manière dont on ne l’attendait pas, sans avoir besoin de voter ni même de prononcer ce mot maudit dont une grande majorité des Britanniques regrette qu’il ait jamais existé. La guerre engagée par la Russie sur notre continent et la sidérante allégeance de Donald Trump à Vladimir Poutine au détriment de l’Alliance atlantique ont resserré les liens comme jamais entre le Royaume-Uni et l’Union européenne.Le président français Emmanuel Macron et le Premier ministre britannique Keir Starmer, dirigeants des deux seules puissances nucléaires de l’Europe et des deux seuls pays européens membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU ont légitimement pris la tête d’une nouvelle Europe, sortie du strict cadre de l’UE. Orphelin d’un parent auquel il avait confié sa sécurité de manière irresponsable, un monde occidental amputé de son gardien se met en place sans l’Amérique pour défendre ce qui reste du monde libre auquel elle n’appartient plus. Il a franchi une nouvelle étape le 27 mars à Paris où se sont rassemblés 31 pays aux côtés du secrétaire général de l’Otan et des institutions de l’UE, constituant cette nouvelle Europe au sens large, faite d’une coalition de pays volontaires sans la Hongrie ou la Slovaquie alliées de Trump et de Poutine, mais déjà agrandie du Canada et de l’Australie. Emmanuel Macron a donné un nom à ce schisme historique. L’Occident qui s’organise autour de l’Europe pour apporter une “réassurance” à l’Ukraine et “gagner la paix” durablement sans l’Amérique, “ça s’appelle la sortie de l’état de minorité géopolitique. Et c’est une bonne chose pour l’Europe.”Leadership franco-britannique”Le moment est venu pour que les Etats forts que sont la France et le Royaume-Uni jouent un plus grand rôle”, a déclaré le Premier ministre tchèque Petr Fiala au Financial Times. Leur leadership est salué par les pays les plus déconcertés par le lâchage de l’Amérique et par l’agonie de l’Alliance atlantique sur laquelle ils avaient entièrement fondé leur confiance et leur sécurité. L’Allemagne, enfant chéri de l’Otan par excellence, a opéré une véritable révolution depuis que le futur chancelier Friedrich Merz a demandé d’envisager l’extension à l’Allemagne du parapluie nucléaire français ou britannique.Reste à gérer la fameuse “relation spéciale” du Royaume-Uni et des Etats-Unis, devenue soudain encombrante. La prise de conscience des pays européens de l’Otan que leur matériel militaire acheté outre-Atlantique, qui représente plus de 60 % de leurs capacités, pouvait rester cloué au sol sans l’aval du Pentagone, vaut pour le Royaume-Uni au niveau nucléaire – mais pas entièrement. Si les Britanniques sont dépendants des Américains pour la partie technique et logistique de leur arme nucléaire, ils conservent une autonomie stratégique pour ce qui est de son utilisation. Leurs sous-marins nucléaires lanceurs d’engins sont équipés de missiles Trident II D5 loués aux Etats-Unis et leurs ogives nucléaires, conçues et développées par le Royaume-Uni, contiennent des composants américains. Cependant, les Etats-Unis n’ont pas de veto sur l’utilisation des armes nucléaires britanniques et le Premier ministre britannique dispose seul de la décision d’utiliser l’arme nucléaire selon son estimation des intérêts vitaux du pays.Mais la relation spéciale a des racines profondes. Elle s’est forgée pendant la Seconde Guerre mondiale, promue par Winston Churchill qui voyait dans la coopération anglo-américaine un moyen de contrecarrer la menace soviétique, et s’est renforcée ensuite à travers divers accords militaires et de renseignement. Elle a suscité la méfiance du général de Gaulle qui, craignant que le Royaume-Uni ne devienne le cheval de Troie des intérêts américains en Europe, s’est opposé en 1963 et 1967 à l’entrée du pays dans la Communauté économique européenne.Ces liens anciens sont d’autant plus difficiles à démêler. Que deviendront les Five Eyes, leur puissante alliance de renseignement avec trois autres pays (Canada, Australie, Nouvelle-Zélande) ? Comment se passer d’accords commerciaux avec les Etats-Unis, quémandés par un Royaume-Uni affaibli par le Brexit ? Keir Starmer évite de critiquer le président américain et de devoir choisir entre l’Europe et l’Amérique. Combien de temps ? Peut-il rester dépendant d’une puissance devenue amie de la Russie ennemie ?
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Author : Marion Van Renterghem
Publish date : 2025-04-02 06:30:00
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