Il y a celles qui ont choisi de rester. Et celles qui ont préféré se séparer d’une filiale. Celles qui ont voulu faire le dos rond comme Lactalis, Sanofi, L’Oréal ou Bonduelle. Et celles qui ont inscrit une grosse dépréciation d’actifs dans leurs comptes en quittant définitivement la Russie dès les premiers mois de la guerre au printemps 2022, comme la Société Générale ou encore Renault. Près de 60 % des multinationales occidentales présentes en Russie au début du conflit ont encore aujourd’hui une activité dans le pays, d’après les derniers relevés réalisés par les experts de la Kyiv School of economics (KSE). Même si une forme de “cordon sanitaire financier” entoure désormais leurs affaires, 1 776 groupes internationaux opèrent toujours en Russie et n’ont pas changé leur plan, 141 ont mis sur pause tous les nouveaux investissements et 364 ont réduit la voilure, en fermant certains magasins par exemple. De l’autre côté, 786 multinationales ont suspendu leur activité et 1 033 ont carrément tiré un trait sur le pays.Alors que le conflit entre dans sa quatrième année et que des discussions entre les Etats-Unis et la Russie ont débuté sur un possible cessez-le-feu en Ukraine, les arguments moraux avancés par certains groupes l’ont-ils emporté sur les intérêts financiers de long terme ? « Ceux qui ont tardé à partir ou n’ont pas voulu quitter le pays sont clairement les perdants de l’histoire. Non seulement, ils ne peuvent plus rapatrier une très large partie des bénéfices qu’ils réalisent dans le pays mais surtout ils ne peuvent quasiment plus vendre leurs actifs même s’ils le souhaitent », observe Agathe Demarais, experte en géoéconomie à l’European Council on Foreign Relations (ECFR).Au fil des mois, la pression s’est accentuée sur les entreprises qui avaient choisi l’attentisme. Dès août 2022, Vladimir Poutine signe un décret stipulant que les entreprises étrangères ne pourront céder leurs actifs russes sans un accord du gouvernement. Dans certains secteurs stratégiques, la signature du maître du Kremlin est même obligatoire. Parallèlement, au fil des paquets de sanctions imposés par les Etats-Unis et l’Union européenne, le nombre des potentiels acheteurs se réduit comme peau de chagrin alors que de plus en plus d’entreprises, d’entités et de personnes morales sont inscrites sur les fameuses listes noires occidentales. Coup de grâce, enfin, en octobre 2024 quand Moscou décide de durcir encore le cadre des cessions : le vendeur doit offrir à l’acheteur une décote d’au moins 60 % du prix et accepter de verser une “contribution volontaire” en impôt à l’Etat russe.L’inconnu des sanctionsUne spoliation qui ne dit pas son nom et qui a fait la fortune de certains nouveaux oligarques qui se sont constitué de petits empires industriels à très peu de frais. Est-ce la raison pour laquelle l’Association Familiale Mulliez qui souhaitait vendre la filiale russe d’Auchan à Gazprombank à l’automne a finalement jeté l’éponge dernièrement ? Le distributeur français, qui espérait en tirer près de 400 millions d’euros, aurait été franchement refroidi par les propositions financières du groupe russe.En attendant, les affaires continuent, même si l’inflation mine la consommation des ménages russes. Toujours d’après les estimations réalisées par Agathe Demarais pour L’Express, les multinationales étrangères présentes encore en Russie auraient dégagé depuis le début du conflit près de 500 milliards d’euros de revenus et payé au fisc russe près de 16 milliards d’impôts et de taxes diverses… La plus généreuse : la banque autrichienne Raiffensen qui aurait versé, à elle seule, près d’un dixième de cette somme. De quoi participer à l’effort de guerre de Vladimir Poutine, alors que les dépenses militaires représentent désormais quasiment 9 % du PIB du pays. Avec la conversion de la Russie en économie de guerre, le budget de l’armée devrait absorber à lui seul plus de 40 % des recettes fiscales du pays cette année.La suite de l’histoire dépendra largement des négociations en cours entre Moscou et Washington. La levée d’une partie des sanctions imposées par les Etats-Unis ferait partie du paquet de demandes mis sur la table par le Kremlin. “A la Chambre de commerce américaine à Moscou, une liste de sanctions possiblement allégées a déjà été établie”, confirme un industriel français encore sur place. Du côté de Bruxelles, David O’Sullivan, le Monsieur sanctions de l’UE, vient d’annoncer, lui, un nouveau train de mesures, touchant cette fois l’aluminium russe. Là aussi, le fossé entre l’Europe et les Etats-Unis s’élargit.
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Author : Béatrice Mathieu
Publish date : 2025-02-19 16:15:00
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