C’est une déception pour les partisans d’une aide légale à mourir pour certaines personnes en fin de vie. François Bayrou souhaite aborder séparément ce sujet, clivant, de celui des soins palliatifs, accédant ainsi à une demande des adversaires de l’euthanasie et du suicide assisté. Le Premier ministre souhaite en effet scinder en deux le projet de loi sur la fin de vie, a-t-on appris mardi auprès de son entourage. Résultat : il n’y aurait donc plus un seul texte, mais une loi consacrée aux soins palliatifs et une autre dédiée à l’aide à mourir.Il y a une semaine, le chef du gouvernement avait simplement renvoyé la fin de vie au “pouvoir d’initiative” du Parlement. Si le choix de deux textes peut apparaître de simple forme, il marque en réalité un développement important dans l’histoire – déjà longue de plusieurs années – du projet de loi censé initialement porter la grande réforme sociétale de la présidence d’Emmanuel Macron. Et suscite déjà la désapprobation de la présidente de l’Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet – une macroniste de la première heure – qui s’est dite mardi soir “opposée” à cette “scission”. “J’attends que le gouvernement et le Premier ministre réinscrivent ce texte dans son ensemble à l’Assemblée nationale” et ce dès “aujourd’hui”, a-t-elle lancé sur France 5. Et ce n’est pas son premier accroc avec François Bayrou, puisque Yaël Braun-Pivet avait déjà été agacée de le voir aller à Pau plutôt qu’à Mayotte.La fin de vie a d’abord fait l’objet d’une convention citoyenne, puis d’un long travail de plusieurs gouvernements pour qu’un projet de loi parvienne finalement début 2024 à l’Assemblée nationale. Il prévoyait le développement des soins palliatifs mais aussi la légalisation, à d’importantes conditions, d’une “aide active à mourir” – concrètement un suicide assisté ou, dans certains cas, une euthanasie. La dissolution de l’été 2024 l’a arrêté net avant un premier vote solennel, alors que les clivages restent vifs. Les partisans de l’aide à mourir y voient un sujet essentiel de liberté et de dignité. Ses adversaires, dont nombre de religieux et certains soignants, craignent une évolution dangereuse éthiquement.”Une question de conscience”Catholique pratiquant, François Bayrou est opposé depuis des années à toute législation sur la fin de vie, souhaitant à la place une amélioration de la loi Claeys-Leonetti. En optant pour deux textes, François Bayrou répond à une demande du second camp et reprend une partie des arguments des sceptiques de l’aide à mourir. Celle-ci “est une question de conscience” quand les soins palliatifs relèvent d'”un devoir de la société à l’égard de ceux qui traversent cette épreuve”, a ainsi justifié l’entourage du locataire de Matignon.Cette position rejoint notamment celle de la Sfap, organisation qui porte la voix des soins palliatifs et s’est toujours montrée très méfiante à l’idée de légaliser le suicide assisté. Deux textes, “c’est quelque chose que l’on demandait depuis le début”, a déclaré à l’AFP sa présidente, Claire Fourcade. “Le sujet des soins palliatifs, qui pourrait avancer très vite, est freiné par le fait d’être couplé à un sujet plus clivant et complexe”.Des intérêts politiques pour François BayrouLe député Olivier Falorni (apparenté MoDem), qui défend de longue date une évolution législative et avait dirigé les travaux sur le projet de loi lors de son passage à l’Assemblée, a ainsi exprimé son désaccord. Soins palliatifs et aide à mourir sont “complémentaires”, a-t-il insisté auprès de l’AFP. Ces deux sujets doivent “être abordé(s) maintenant et en même temps, pas séparément et dans longtemps”.Car les partisans de l’aide à mourir craignent l’abandon de ce volet, même si l’entourage du Premier ministre assure que les deux thèmes seront examinés dans la “même temporalité parlementaire”, sans précisions. “Séparer le texte, c’est céder aux représentants religieux et aux opposants à l’euthanasie, séparer pour finalement ne rien faire ?”, s’est interrogée sur le réseau X l’Association pour le droit à mourir dans la dignité (ADMD).📑 Depuis le départ, nous parlons d’un seul et même texte sur l’accompagnement en #FindeVie… continuum des soins et de l’aide à mourir.
Séparer le texte, c’est céder aux représentants religieux et aux opposants à l’#euthanasie, séparer pour finalement ne rien faire ? #santé https://t.co/QkcCRwkTks— Mourir dans la Dignité (@ADMDFRANCE) January 21, 2025Pour François Bayrou, l’enjeu est aussi politique. Plusieurs membres de son gouvernement ont exprimé leurs fortes réticences sur l’aide à mourir, à commencer par le ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, qui avait clairement dit ne pas souhaiter le retour du texte à l’Assemblée. “Dans une situation où il n’y a pas de budget pour la France”, la fin de vie “n’est pas une urgence”, argumentait aussi en privé un autre ministre il y a quelques semaines. Mais scinder le texte en deux “peut être un moyen d’aller plus vite et d’être plus efficace”, a défendu la députée Renaissance Stéphanie Rist, selon laquelle “c’était aussi une demande forte du Sénat d’avancer dans ce sens.” Ce mercredi, la porte-parole du gouvernement Sophie Primas a de fait assuré à l’issue du Conseil des ministres qu’il n’était “pas question du tout d’abandonner” le sujet. Il “sera à l’agenda le plus vite possible”, a-t-elle déclaré, voulant “rassurer les associations”. “Mais il est question de libertés individuelles, du vote du Parlement sur des sujets qui sont des sujets distincts”, a-t-elle ajouté.
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Publish date : 2025-01-22 11:40:00
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