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L’Express

Starlink, l’arme fatale d’Elon Musk : ses atouts pour conquérir le monde

Starlink, l’arme fatale d’Elon Musk : ses atouts pour conquérir le monde

Cela semblait être un pari fou jusqu’en février 2022. Offrir un accès à Internet par satellite avec des débits proches de ceux sur terre et une faible latence. Le tout grâce à de longues constellations d’appareils en orbite basse, visibles à l’œil nu depuis la Terre… Pour qui, pour quels usages ? L’invasion de la Russie par l’Ukraine et le déploiement très rapide de la technologie sur place a rendu la promesse de Starlink on ne peut plus concrète. Depuis, la compagnie, propriété de SpaceX, dirigée par Elon Musk, tisse sa toile à grande vitesse.Au sein du grand public, d’une part. Starlink revendique 4,6 millions d’utilisateurs à travers le globe, principalement dans des zones où la connectivité est insuffisante, voire totalement absente. Pas vraiment en France, donc, très bien couverte en fibre et en 5G. Mais ce n’est pas le cas partout. Environ 2,6 milliards de personnes à travers le monde n’ont pas un accès fiable à Internet, d’après l’Union internationale des télécommunications (UIT). Starlink rencontre par exemple un fort succès en Afrique, comme au Zimbabwe, où le service est déjà à saturation, relate le média Rest of The World. Sur ce continent, les tarifs de ces abonnements satellites sont même parfois moins chers que chez les fournisseurs terrestres classiques. Dans une étude publiée courant 2024, la banque Morgan Stanley anticipe pour Starlink 32 millions d’abonnés d’ici à 2040, voire 80 millions dans un scénario plus optimiste encore.Bien assez pour satisfaire Elon Musk qui a affirmé, au printemps 2024, que cette filiale de SpaceX est déjà rentable. « Selon nos estimations, c’est bien le cas, depuis la toute fin de l’année 2023 », confirme à L’Express Maxime Puteaux, consultant chez NovaSpace, une société spécialisée dans l’analyse du marché spatial. Si les chiffres exacts demeurent confidentiels, Starlink contribue activement à la profitabilité de sa société mère SpaceX, dont le chiffre d’affaires s’élevait en 2023 à 8 milliards de dollars, précise l’expert.Starlink capitalise surtout sur son avance sur la concurrence. L’entreprise survole une centaine de pays grâce à une flotte de près de 7000 satellites. Ni OneWeb, qui a pour le moment lancé environ 600 satellites, ni Kuiper du géant du commerce en ligne Amazon, en gestation, ne peuvent rivaliser en termes de couverture et d’accessibilité. Pas plus que d’autres constellations européennes ou chinoises récemment annoncées, et pas encore dans le ciel. Pour rappel, l’Internet satellitaire d’ancienne génération – avec des appareils situés à près de 36 000 kilomètres de hauteur contre 550 pour Starlink – n’est quant à lui plus compétitif en matière de rapidité ou de débit.Contrats militairesAlors, Starlink engrange. Outre le grand public, les gouvernements y succombent de plus en plus en réaction ou en prévision d’urgences civiles. Le Premier ministre français François Bayrou a immédiatement réclamé en urgence le déploiement de 200 antennes Starlink après le passage du dévastateur cyclone Chido à Mayotte, mi-décembre. Au Japon, les municipalités de la préfecture d’Ishikawa, en proie à de violents séismes, ont aussi contracté avec la compagnie sur un horizon de plus long terme. L’Italie suit le même chemin. En retard sur ses objectifs de connectivité 5G et fibre, la Botte réfléchit à une solution d’urgence via Starlink dans les zones les plus inaccessibles ou exposées aux catastrophes naturelles. Un choix « pragmatique » pour les États nous explique un connaisseur du secteur : « Quand la densité de population diminue, le coût marginal pour connecter un nouveau foyer à la fibre augmente de manière exponentielle. » Le satellite fait ici figure de solution rapide à installer et plutôt bon marché.Toujours au sein des gouvernements, dans le sillage de son intervention en Ukraine, les contrats militaires ont également le vent en poupe. La société d’analyse Quilty Space estime que l’entreprise pourrait doper son chiffre d’affaires en 2025 spécifiquement grâce à l’essor de ce business. En premier lieu, grâce à son partenariat avec États-Unis, qui exploitent un réseau Starlink spécialement dédié aux questions militaires, baptisé Starshield. D’après Bloomberg, l’Ukraine bénéficie aussi de ce soutien depuis l’été dernier, après un accord avec le Pentagone.Mais des clients pour le moins inattendus pourraient surgir. L’Italie, encore elle, envisagerait d’utiliser Starlink pour ses communications chiffrées. Ce projet de contrat de cybersécurité à 1,6 milliard de dollars, dévoilé il y a quelques jours par Bloomberg, a été vivement critiqué par l’opposition à la Première ministre Giorgia Meloni. Il suscite aussi les réticences des observateurs. « Le gestionnaire de la constellation a forcément accès aux données. C’est une perte de souveraineté pour l’Italie et potentiellement pour ses alliés, comme la France, dans le cas d’échanges entre les deux nations », juge Philippe Steininger, conseiller militaire du président du Centre national d’études spatiales (CNES). L’expert évoque des relations tendues entre Rome et ses partenaires européens sur le domaine spatial, notamment au sujet de la constellation de satellites européens Iris², tout juste officialisée. Musk, bras droit du nouveau président américain Donald Trump qu’il a énergiquement soutenu, entretient par ailleurs de bonnes relations avec Giorgia Meloni. Les deux ont donc tout pour s’entendre. A court terme, du moins. L’éventuel contrat porterait sur cinq années, laissant ouvert un repli à terme vers Iris², lors de sa mise en service espérée autour de 2030.Du Wi-Fi dans l’avion ?Si tout se passe bien. Car l’avance de Starlink pourrait, dans ce laps de temps, rapidement se creuser. La pépite du spatial envisage, à terme, de faire graviter plusieurs dizaines de milliers de satellites et d’améliorer sa couverture. Il dispose d’un atout majeur dans cette mission : le lanceur Starship de SpaceX, le meilleur de sa catégorie. La compagnie est pour le moment la seule à pouvoir envoyer autant d’appareils en orbite, de façon régulière, et de surcroît, de plus en plus volumineux. « Les premières générations pesaient environ 300 kilos, ceux actuellement lancés sont autour de 800 kilos et, bientôt, la troisième génération sera à 1,2 tonne », note Maxime Puteaux, de Nova Space. De quoi absorber toujours plus de trafic et améliorer les performances des constellations pour lancer de nouveaux services. Starlink a testé, l’an passé, avec succès une nouvelle technologie « direct-to-cell », qui permet de connecter n’importe quel mobile 4G ou 5G à ses satellites. L’offre pourrait être diffusée d’ici fin 2025 auprès d’opérateurs internationaux et bousculer le marché mondial de la téléphonie mobile.En cas d’échec, d’autres marchés semblent eux mûrs pour l’Internet satellitaire à basse orbite, comme le transport grand public et professionnel, dont la connectivité est notoirement mauvaise. Starlink a déjà convaincu plusieurs cadors. Par exemple, Air France qui proposera gratuitement, sur ses vols, une expérience Wi-Fi « comme au sol » pour ses adhérents FlyBlue à partir de mi-2025. Toujours via un partenariat avec la firme créée par Elon Musk, Icomera, un leader des solutions de connectivité dans les transports (SNCF, etc.), affirme quant à lui pouvoir livrer dès le premier trimestre 2025 à ses clients des connexions ininterrompues dans les trains, avec un débit se rapprochant de ceux d’un réseau « 5G en centre-ville ». Outre AirFrance et Icomera, les compagnies Qatar Airways, United, la compagnie publique dans le ferroviaire ScotRail, ou le géant Royal Caribbean dans le secteur de la croisière, sont également acheteurs. Tout comme Maersk dans le fret maritime. Et demain, les véhicules, dont les Tesla d’Elon Musk ?Un marché à 56 milliards de dollarsStarlink exploite habilement son avance, mais n’a pas d’autre choix que de se dépêcher. D’abord, en vertu d’une licence accordée par les Etats-Unis : la firme a l’obligation d’atteindre le seuil de 12 000 satellites lancés d’ici 2027. Il lui faut les rentabiliser. Elle doit également remplacer ses premiers appareils, qui ont une durée de vie de cinq ans. Cela devrait engendrer une hausse non négligeable de ses coûts. De premiers ralentissements pourraient du reste se faire sentir. Starlink peine à convaincre l’énorme marché indien de s’ouvrir à lui et a, sans surprise, trouvé porte close en Chine ou en Russie. Des pays africains comme le Cameroun demeurent réticents à accepter Starlink. La personnalité de Musk peut enfin rebuter des dirigeants comme en Europe où il sème la zizanie.Puis, la concurrence finira par arriver. La société Blue Origin de Jeff Bezos, le fondateur d’Amazon, est sur le point de lancer sa fusée New Glenn, pour permettre à Kuiper de mettre en orbite ses premiers satellites. Une foule d’autres challengers plus petits sont également sur les rangs. Charles Delfieux, dirigeant de la start-up française Constellation technology opération, créée en 2022, compte rivaliser avec Starlink en envoyant des satellites encore plus bas que l’Américain, à 375 kilomètres au-dessus de nos têtes. Et entend s’allier aux opérateurs mobiles pour utiliser leurs fréquences de télécommunications 5G. Un positionnement qui lui permettra d’obtenir des latences plus faibles et donc une transmission plus rapide. Mais aussi de réduire certains coûts, notamment dans la conception des terminaux utilisateurs. Le service, à l’arrivée, pourrait être bon marché. Starlink, lui, ne l’est pas toujours. Ses antennes se monnayent, pour l’heure, plusieurs centaines de dollars. Bousculer Musk sur son terrain de jeu ne sera toutefois pas simple. Mais Charles Delfieux estime à « 56 milliards de dollars » le grand gâteau de la connectivité haut débit depuis l’espace, à l’horizon 2035. Une excellente raison de ne pas laisser à l’homme le plus riche du monde l’accès unique à l’orbite terrestre.



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Author : Maxime Recoquillé

Publish date : 2025-01-16 07:00:00

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