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L’Express

Municipales 2026 : en Seine-Saint-Denis, les ambitions de LFI menacent l’ex-bastion communiste




Samedi 14 décembre, jour de conférence nationale au 2, place du Colonel-Fabien. Tout un programme. Les 500 délégués nationaux échangent et débattent des obstacles empêchant le Parti communiste français de devenir une force majoritaire dans le pays. Les prochaines échéances sont dans le viseur, dont les municipales de 2026, pour lesquelles les communistes ont accouché d’une stratégie somme toute consensuelle, et fidèle à ses traditions. « Nous restons sur la même ligne : renforcer les majorités de gauche, réussir de nouvelles conquêtes face au danger de l’extrême droite et des droites, faire élire le plus grand nombre de communistes dans ce cadre dans tout le pays », explique Christian Picquet, tête pensante du PCF. Car les communistes, dont le nombre de bastions municipaux s’amenuise au fil des scrutins, jouent gros. Notamment en Seine-Saint-Denis, fief emblématique de la ceinture rouge francilienne, où la menace insoumise pointe le bout de son nez. »Plus de pertes que de gains » à partir des années 1980Retour en arrière. Seine-Saint-Denis, territoire monolithique. Nous sommes en 1977, apogée du communisme municipal, et le PCF, qui compte près de 20000 adhérents, dirige 27 mairies. Le « 93 », numéro accordé au département à sa création, continue de susciter la fierté de ses élus communistes, en écho à l’année révolutionnaire de 1793. Education populaire, politiques actives dans le domaine de la culture… la banlieue rouge n’est pas qu’une chanson de Renaud, elle est – parfois un brin mythifiée – une réalité politique, un laboratoire : « Le monde ouvrier travaillait dans des industries implantées dans la ville. Le parti assurait un encadrement social et politique important, à travers les réseaux municipaux, associatifs et sportifs », analyse David Gouard, politologue et auteur de La banlieue rouge. Ceux qui restent et ce qui change, (Le Bord de l’eau, 2014).Mais le délitement est progressif, sur fond de transformations sociologiques, économiques et démographiques du département. « La population ouvrière, intégrée, syndiquée, souvent employée par de grandes entreprises de la métallurgie, dans laquelle le PC puisait ses cadres, ses militants et ses électeurs, est remplacée, de plus en plus, par une population de pauvres, exclue durablement du marché du travail ou n’y participant qu’épisodiquement, dans des statuts précaires, des entreprises de services ou d’intérim, et souffrant de ce facteur supplémentaire de marginalisation que constitue une nationalité étrangère ou une origine immigrée », relevait en 2004 le géographe Philippe Subra. Les effets sont politiques. « Après chaque élection municipale à partir du début des années 1980, il y a toujours plus de pertes de municipalités que de gains pour le PCF », poursuit David Gouard. Les deux décennies suivantes sont marquées par la concurrence du Parti socialiste, symbolisée en 2008 par la prise du Conseil général de Seine-Saint-Denis, ravi au communiste Hervé Bramy par le baron rose Claude Bartolone. « Depuis les élections municipales de 2008, l’érosion est également au profit de la droite », conclut le politologue. 2020 est un coup de massue : Saint-Denis, ville rouge depuis la Libération, passe sous pavillon rose. En Seine-Saint-Denis, les communistes ne dirigent plus que six villes (dont quelques maires apparentés). Pierre Laurent, ancien secrétaire national du PCF, relativise : « Dans ce contexte d’affaiblissement global du PCF au national, le département reste un point de force du parti. » »Mélenchon sera un acteur incontournable des municipales »Pour combien de temps ? Samedi 14 décembre, toujours, cette fois-ci à l’Assemblée représentative de La France insoumise, à Paris. Les troupes mélenchonistes dressent, eux aussi, leurs ambitions. Cette fois-ci, ils ne feront pas l’impasse sur les élections locales, enjeu capital pour les futures échéances sénatoriales ; Jean-Luc Mélenchon n’a que trop mal digéré que ses troupes aient été balayées du Palais du Luxembourg. « Il s’est fait avoir l’année dernière, en 2026 il sera un acteur incontournable des élections municipale »», affirme l’un de ses interlocuteurs réguliers. Pour ses dix ans, LFI souhaite se muer en un « mouvement communaliste » et réaffirmer « la commune comme premier échelon de la démocratie ».Alors on commence à « flécher ». La Seine-Saint-Denis, forte de ses 7 députés LFI sur 12 (tous parlementaires de gauche), est bien sûr une cible prioritaire, où 37,13 % des Séquano-Dionysiens ont accordé leur confiance à la liste de Manon Aubry – contre 2,82 % pour le communiste Léon Deffontaines – seul département où elle est arrivée en tête. « Les réalités électorales du pays ne se traitent pas en transposant les résultats les uns sur les autres, prévient Christian Picquet. Les maires communistes observent une certaine stratégie communautariste des insoumis que le PCF a toujours combattue. » David Gouard nuance : « Nationalement sur ce sujet, les deux partis sont sur une tradition différente. Mais en région parisienne, il y a une superposition des stratégies entre le PCF et LFI en matière de laïcité. » »Quand on fait plus 50 % dans une ville, il faut s’attendre à ce qu’il y ait des listes avec un n°1 LFI », met en garde Paul Vannier, « Monsieur élections » des insoumis. C’est le cas de plusieurs villes dirigées par des communistes ou apparentés – souvent aux côtés de LFI – comme Stains (52,59 %), Bobigny (52,95 %), ou La Courneuve (58,12 %). Dans cette dernière où l’actuel maire, Gilles Poux, a annoncé qu’il ne briguera pas un nouveau mandat après trente ans aux commandes de la ville, Mohamed Awad, ancien des Jeunes Musulmans de France (fondé par le sulfureux imam Hassan Iquioussen) a d’ores et déjà annoncé sa candidature pour LFI alors que l’édile semblait avoir trouvé sa successeure en la personne de Nadia Chahboune, son adjointe. La guerre de succession est ouverte, dans cette commune de près de 50 000 habitants. « On ne peut pas éviter les velléités des uns et des autres, et on ne peut que le regretter », souffle Emilie Lecroq, secrétaire départementale du PCF en Seine-Saint-Denis. Et quid des villes où le maire sortant souhaiterait se représenter ? « Tout cela sera discuté. On arrive dans une séquence où chaque écurie politique veut garder ses acquis : nous sommes là pour dire que celui qui tranche, c’est le peuple », cingle Bally Bagayoko, le co-délégué chargé des relations unitaires du département. Autant dire que dans la galaxie insoumise, tout reste permis. »2026, c’est une nouvelle ère »A Saint-Denis, communistes et insoumis ont l’opportunité de trouver un terrain d’entente. Ensemble dans l’opposition depuis la victoire du maire rose Mathieu Hanotin, ils partagent la même ambition de renverser l’édile en 2026. Les deux formations d’extrême gauche ont pourtant un passif. En juin 2020, la liste communiste du maire sortant Laurent Russier et celle de l’insoumis Bally Bagayoko devaient fusionner en vue du second tour. Raté : le premier avait accusé le second d’avoir voulu maintenir, jusqu’au bout, le candidat Madjid Messaoudène en position éligible. L’édile sortant l’accusait d’avoir pris des positions « clivantes sur la place des religions, la laïcité, l’égalité femme-homme, les rapports police-population… » Aujourd’hui, chacun assure vouloir tourner la page.Le 18 décembre, communistes et insoumis se sont réunis pour discuter des prochaines échéances locales. Mais rien n’est gagné. « Voilà la règle du jeu : il n’y a pas un sortant à date, et la prime ne peut pas être à ceux qui ont perdu la ville, lâche Bally Bagayoko. Je serai candidat pour La France insoumise. » Les communistes, de leur côté, préfèrent parler de « chef de file ». « 2026, c’est une nouvelle ère », surenchérit l’insoumis. Et l’emblématique ceinture francilienne d’arborer une nouvelle nuance de rouge ?



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Author : Mattias Corrasco

Publish date : 2024-12-29 07:30:00

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