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L’Express

Agriculteurs, retraités… Les gagnants et les perdants en cas de censure

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À quelques heures du vote de la motion de censure qui pourrait faire tomber le gouvernement Barnier, une question revient sur tous les plateaux télévisés : la France joue-t-elle gros sur le plan économique ? Car si le projet de loi de finances pour 2025 n’est pas encore enterré, il y a très peu de chances que son examen aboutisse en cas de chute de l’exécutif. Croissance affaiblie, assainissement budgétaire ralenti, incertitude accrue… La censure probable du gouvernement pénalisera l’Hexagone, prédisent des économistes, sans forcément la plonger dans « la tempête » redoutée par l’exécutif. Loi spéciale ou ordonnance, la France dispose de plusieurs moyens d’éviter une paralysie qui empêcherait les fonctionnaires d’être payés par exemple. Cela se traduirait par la reconduction du budget 2024. Reste à savoir qui a le plus à perdre.À l’aube de la motion de censure, la menace d’un poids de l’impôt sur le revenu plus important est brandie par le gouvernement. « Près de 18 millions de Français verront leur impôt sur le revenu augmenter, d’autres en paieront pour la première fois parce qu’on n’aura pas pu inscrire dans la loi de finances la réindexation qui est prévue […] pour le barème des tranches d’impôt, c’est inéluctable », a affirmé, de façon solennelle, le Premier ministre Michel Barnier, invité par France 2 et TF1 mardi soir. En cas de chute du gouvernement, le barème de l’impôt sur le revenu ne serait donc pas indexé sur l’inflation, ce qui contraindrait 380 000 nouveaux ménages à faire un geste fiscal pour la première fois.Si ce scénario a de quoi échauder certains Français, il est loin d’être le plus probable, rassure le directeur des études économiques à l’IESEG School of Management Eric Dor, joint mardi soir par l’AFP. Un budget pour 2025 voté ultérieurement, au cours de l’année 2025, « contiendra nécessairement cette clause puisque c’est l’habitude de la mettre », souligne-t-il.En plus de la classe moyenne, les collectivités territoriales, dont la dotation versée par l’Etat risquerait d’être gelée, pourraient figurer parmi les perdants, souligne à l’AFP Maxime Darmet, économiste chez Allianz, qui y voit un risque pour le fonctionnement des services publics. Certaines pourraient compenser le manque à gagner en relevant les taxes locales, notamment la taxe foncière, selon lui. De quoi pénaliser davantage les contribuables.Un recul pour les agriculteursAlors qu’ils exprimaient leur colère dans toute la France depuis plusieurs jours, les agriculteurs verraient certaines victoires, validées par la loi de finances, partir en fumée, en cas de motion de censure adoptée. « Depuis près d’un an, […] on a obtenu un certain nombre de choses. Mais la dissolution et la menace aujourd’hui qui pèse sur le gouvernement nous laissent à penser qu’un certain nombre des avancées qui ont été annoncées ne seront pas forcément au rendez-vous. C’est le cas, par exemple, des prêts de trésorerie sur lesquels la ministre [de l’Agriculture, Annie Genevard] a fait des annonces il y a trois semaines », déplorait ainsi Arnaud Rousseau, président de la FNSEA, vendredi 29 novembre.Les agriculteurs étaient notamment parvenus à arracher la réforme du calcul de leur pension de retraite ou des avantages fiscaux et sociaux. Le monde agricole pourra néanmoins se consoler avec le budget plus élevé de leur ministère. « Le PLF 2025 prévoit une dotation à l’Agriculture de 6,79 milliards d’euros en autorisations d’engagement et de 6,60 milliards en crédits de paiement, contre 7,6 et 7 milliards d’euros dans le PLF 2024 », soulignent nos confrères de Public Sénat.Autre secteur à être touché de plein fouet par cette instabilité politique : l’armée. « Le vote d’une censure du gouvernement, et donc de l’absence de budget pour l’année 2025, viendrait briser cet élan essentiel pour la protection de nos concitoyens, en empêchant la hausse proposée de 3,3 milliards d’euros pour le budget de notre défense », écrit sur le réseau social X Sebastien Lecornu, évoqué pour remplacer Michel Barnier à Matignon. Le ministre prévient que ce choix politique aurait des conséquences « très concrètes » sur plus de  » 200 000 emplois dans plus de 4 000 entreprises partout sur nos territoires ».Depuis 2017, sous l’impulsion du Président de la République, nous avons oeuvré sans relâche pour réarmer notre pays.

Ce réarmement, le Parlement a confirmé son amplification à l’été 2023 en votant la loi de programmation militaire, en vue de plus que doubler le budget des…— Sébastien Lecornu (@SebLecornu) December 2, 2024Même déception chez la ministre chargée des personnes handicapées Charlotte Parmentier-Lecocq qui s’est dit, mardi 3 décembre, « inquiète » pour l’impact pour les personnes handicapées, d’une censure du gouvernement Barnier, listant les mesures « très attendues » qui seraient « en stand-by », comme le remboursement intégral des fauteuils roulants. « C’est 270 millions d’euros, c’est-à-dire un budget extrêmement important, qu’on avait prévu de déployer », pour « les 50 000 solutions », qui doivent permettre de « mieux accompagner » des personnes en situation de handicap », a-t-elle poursuivi. À noter que si le budget de l’an dernier était reconduit, il ferait l’impasse sur les 2 000 AESH supplémentaires, c’est-à-dire les personnes qui accompagnent les enfants en situation de handicap à l’école ou bien sur le remboursement intégral des fauteuils roulants, dont les modalités devaient être définies « avant la fin de l’année ».Les retraités remportent la miseS’il y a des perdants, il y a également des gagnants. À commencer par les 17 millions de retraités qui verront finalement leur pension revalorisée au 1er janvier 2025, alors que le gouvernement ne prévoyait de le faire entièrement que pour les pensions inférieures au Smic, avec un décalage en prime. Il s’agissait d’ailleurs de la dernière « ligne rouge » de la patronne du Rassemblement national, Marine Le Pen. Le budget de la Sécurité sociale prévoit en effet une hausse de 0,8 % pour tous les retraités au 1er janvier 2025, soit la moitié de l’inflation seulement, avant une seconde vague de revalorisation de 0,8 % au 1er juillet pour les retraités sous le Smic. Interrogée sur franceinfo mercredi, la ministre du Travail Astrid Panosyan-Bouvet l’a confirmé : « les retraités seraient effectivement gagnants. » Coût pour l’Etat : environ 3 milliards d’euros.Par ailleurs l’Etat devrait renoncer aux hausses d’impôts – au moins 20 milliards – qu’il envisageait, comme la surtaxe sur les très hauts revenus ou les bénéfices des grandes entreprises. Par conséquent, elles échapperaient à la « contribution exceptionnelle » qui aurait dû permettre au gouvernement de récupérer 8 8 milliards d’euros en 2025 et 4 milliards en 2026 avec cette taxe. Au total, 450 entreprises réalisant plus d’un milliard d’euros de chiffre d’affaires étaient concernées. À noter cependant que les grands groupes pourraient pâtir de l’instabilité financière du pays, bien qu’ils soient moins exposés que les petites et moyennes entreprises.Et parmi les entreprises qui se frottent les mains, figurent les compagnies aériennes. Celles-ci pourraient voir se volatiliser la taxe de solidarité sur les billets d’avion, qui devait s’appliquer au 1er janvier et rapporter 150 millions d’euros. Cette taxe avait reçu le feu vert du Sénat, bien que le montant ait été revu à la baisse : il devait ainsi passer de 2,63 à 5,30 euros pour un billet en classe économique vers la France ou l’Europe, au lieu des 9,50 euros envisagés par l’exécutif. Soupir de soulagement également chez les transporteurs maritimes : le budget, qui devrait être balayé, comporte une « contribution exceptionnelle » – qui prévoyait de s’élever à 500 millions d’euros en 2025 et à 300 millions en 2026 – visant spécialement le géant français du fret maritime, CMA-CGM, propriété de Rodolphe Saadé. Sans doute bientôt de l’histoire ancienne.

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Publish date : 2024-12-04 11:47:00

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