L’Express

Le RN aux portes du pouvoir ? « Les investisseurs demandent une prime de risque plus élevée »

Marine Le Pen et Jordan Bardella, le dimanche 9 juin 2024.




L’exécutif est en campagne, y compris, et surtout, Emmanuel Macron. Depuis son annonce de la dissolution de l’Assemblée nationale dimanche soir, le président de la République multiplie les saillies contre ses adversaires politiques, du Rassemblement national (RN) à l’union de la gauche, regroupée sous la bannière du Nouveau Front populaire.Si le RN arrive au pouvoir, « le crédit coûtera plus cher », a affirmé Emmanuel Macron lors de sa conférence de presse de mercredi 12 juin. Expliquant que les prêts immobiliers vont flamber parce que les taux vont flamber « . Et son ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, de renchérir : « si le RN applique son programme, une crise de la dette est possible en France ». Projections fictives ou bien réelles ? Pour L’Express, Anthony Morlet-Lavidalie, économiste chez Rexecode, décrypte les enjeux d’une arrivée aux responsabilités du Rassemblement national de Jordan Bardella et Marine Le Pen le 7 juillet prochain.L’Express : Le scénario évoqué par Emmanuel Macron est-il possible, voire probable ?Anthony Morlet-Lavidalie : À ce stade, la prudence reste de mise. Il s’agit d’analyser les premiers signaux. Il est important de mentionner que les taux français à 10 ans, c’est-à-dire le coût auquel la France s’endette à dix ans, se sont tendus depuis dimanche. On remarque notamment que l’écart de taux entre la dette française à 10 ans et son équivalent allemand s’est sensiblement élargi. Cela signifie que les investisseurs demandent une prime de risque plus élevée pour accepter de détenir de la dette française. Pire, il y a même un changement de hiérarchie ces derniers jours dans le classement des pays européens : le Portugal et la Belgique ont désormais des taux de marché inférieurs à celui de la France. La hiérarchie traditionnelle s’est inversée.Plus précisément, en ce qui concerne la question des crédits immobiliers, si les taux longs (à 10 ans) augmentent, cela aura effectivement des répercussions sur le crédit bancaire et l’ensemble des crédits distribués aux ménages et aux entreprises, notamment sur les prêts immobiliers. De manière générale, il y a une transmission des taux souverains, ceux auxquels s’endette l’Etat français, qui pourrait se répercuter sur les autres agents (ménages, entreprises). Si les taux souverains français à 10 ans venaient à être discriminés à cause des résultats de l’élection, à la fin ce serait aussi bien l’Etat que les ménages et les entreprises qui paieraient plus cher leurs crédits…Pour autant, la Banque centrale européenne (BCE) a décidé d’abaisser ses taux directeurs le 6 juin dernier. En cas de victoire du RN, cela ne se ressentirait-il pas sur le marché français ?Globalement, le mouvement enclenché par la Banque centrale européenne ne devrait pas être remis en question. La BCE est indépendante et elle ajuste les taux en fonction de son mandat qui est de stabiliser l’inflation à un niveau proche mais inférieur à 2 %. Si les pays de la zone euro devraient bénéficier de l’assouplissement de la politique monétaire, la France pourrait moins profiter de ce mouvement en cas de victoire d’un parti populiste du fait de la prime de risque qui découlerait de la méfiance des investisseurs.Qu’est ce qui inquiète précisément les milieux économiques ?Ce qui fait peur aux marchés c’est le risque qu’un parti se situant aux extrémités du spectre politique l’emporte et mène une politique économique non soutenable. D’un côté comme de l’autre, les programmes économiques sont peu crédibles, et risquent d’engendrer beaucoup de dépenses publiques supplémentaires alors que nous sommes déjà à un niveau très élevé qui montre des signaux clairs d’inefficacité.De plus, nous partons d’une situation où nos finances publiques s’avèrent très dégradées. Entre 2022 et 2023, la France est un des seuls pays de l’UE à avoir enregistré une dégradation de son solde public primaire (c’est-à-dire hors charges d’intérêt sur la dette). Or, l’une et l’autre formation politique proposent toutes deux d’aller encore plus loin dans les dépenses publiques. En outre, la remise en question de la réforme des retraites inquiète.Plus généralement, une crise de la dette est-elle à craindre en cas de victoire du RN le 7 juillet prochain, comme l’affirme Bruno Le Maire ?Est-ce que la probabilité est élevée, non. Ce n’est pas le scénario central, en revanche, la probabilité d’occurrence de ce risque extrême, qui aurait des conséquences dévastatrices, a augmenté dans le spectre de l’arrivée au pouvoir d’un parti populiste. C’est indéniable.



Source link : https://www.lexpress.fr/argent/immobilier/le-rn-aux-portes-du-pouvoir-les-investisseurs-demandent-une-prime-de-risque-plus-elevee-72UZTKHTFBDETB6FXOQKHZNG3I/

Author :

Publish date : 2024-06-16 08:30:00

Copyright for syndicated content belongs to the linked Source.

Tags : L’Express
Quitter la version mobile

.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .... . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ++