L’Express

La stratégie inédite de l’Ukraine pour éviter une nouvelle offensive russe d’ampleur

Un char de la 1ère brigade de chars des forces terrestres ukrainiennes, dissimulé par des filets de camouflage, le 31 mars 2024




Avec l’arrivée des beaux jours en Ukraine, les craintes que les troupes russes mènent un nouvel assaut majeur grandissent sur le front. Afin de pouvoir le repousser, à la faveur de l’assèchement des sols après les boues de la raspoutitsa, Volodymyr Zelensky a annoncé mi-mars la construction de 2000 kilomètres de fortifications, composées de trois lignes de défenses. Deux semaines plus tard, le président ukrainien a même enfilé ses habits de chef de chantier. « J’ai inspecté des tranchées, des abris, des postes de tir, de commandement et d’observation. Nous renforçons nos défenses », a-t-il lancé sur Telegram, le 27 mars, après une visite des travaux en cours dans la région de Soumy, au nord de l’Ukraine. »Les Russes avaient fait ce travail l’année dernière avec leur ligne Sourovikine dont la construction avait en partie expliqué l’échec de la contre-offensive ukrainienne, souligne le général Jérôme Pellistrandi, rédacteur en chef de la Revue Défense nationale. Aujourd’hui, les Ukrainiens veulent faire la même chose en urgence pour les empêcher de grignoter leur territoire. » Selon le Premier ministre ukrainien Denys Shmyhal, plus de 710 millions d’euros avaient d’ores et déjà été alloués aux constructions à la mi-février.La pénurie de munitions dans le camp ukrainien – dans un contexte de blocage persistant des aides à Washington – pourrait inciter les forces russes à accentuer leur offensive. « La fenêtre d’opportunité, c’est maintenant, et les Russes le savent, abonde le général Nicolas Richoux, ancien commandant de la 7e brigade blindée. A terme, la montée en puissance de l’industrie de défense occidentale finira par leur compliquer la tâche. »Tout l’enjeu pour les forces ukrainiennes est de parvenir à encaisser le choc. Après avoir plaidé dès le mois de janvier pour une stratégie de « défense active », visant à tenir ses positions tout en infligeant le maximum de pertes à l’ennemi, l’ex-commandant des forces terrestres ukrainiennes, aujourd’hui chef des armées, Oleksandr Syrsky, a assuré fin mars que la construction de fortifications constituait désormais « l’une des priorités » tant au sommet de l’Etat que dans l’armée.Le président ukrainien Volodymyr Zelensky marchant le long des tranchées, dans la région de Soumy, le 27 mars 2024.Accélérer la constructionSur l’ensemble de la ligne de front, les forces ukrainiennes s’affairent aujourd’hui à creuser tranchées et fossés antichars, auxquels s’ajoutent des casemates, des champs de mines et des « dents de dragon » (des cônes de béton chargés de ralentir la progression des blindés). « Chaque ligne de défense est précédée de mines et d’obstacles pour ralentir la progression de l’ennemi, détaille le général Pellistrandi. Cela permet au défenseur de lui infliger un maximum de pertes avec son artillerie grâce à des plans de tir préalablement établis. » Un moyen efficace de résister aux attaques en économisant hommes et munitions. « La profondeur est faite pour user l’adversaire, complète le général Richoux. Vous épuisez l’ennemi sur la première ligne de défense, vous le cassez sur la seconde et vous l’empêchez de passer la troisième. »Le défi est aujourd’hui d’accélérer les travaux de construction. Si un groupe de travail avait été créé dès le mois de novembre à la demande de Volodymyr Zelensky pour coordonner leur mise en œuvre le long du front, les travaux ne se sont réellement intensifiés que trois mois plus tard. « Il y a eu du retard, observe le général Pellistrandi. Le pivot défensif s’est vraiment accentué depuis que l’ancien chef des armées Valery Zaloujny a été remplacé par Oleksandr Sysrsky à la mi-février. » Après la chute d’Avdiivka le 17 février, les forces russes sont parvenues à poursuivre progressivement leur avancée vers l’ouest, suscitant des interrogations sur la solidité des défenses ukrainiennes dans la zone. Le 5 avril, Moscou a ainsi revendiqué la prise du village de Vodiané, à environ 6 kilomètres au sud-ouest d’Avdiivka.Les défenses ukrainiennes peuvent-elles être prêtes à temps ? « En 2023, les Russes ont construit les leurs dans la précipitation et sont malgré tout parvenus à mettre en place un système fortifié très impressionnant, note le général Richoux. Si Kiev parvient à mener à bien ses fortifications, les Russes auront autant de difficultés à percer que les Ukrainiens l’an dernier. » De quoi augurer de lourdes pertes en cas d’offensive. Lors du récent assaut d’un bataillon de chars le 30 mars près du village de Tonenke, dans la région de Donetsk, les forces russes auraient déjà perdu pas moins de 12 chars et 8 blindés. Sans réussir à percer.



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Author : Paul Véronique

Publish date : 2024-04-07 09:30:00

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