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Mort de Navalny, détention d’Orlov… Que reste-t-il de l’opposition à Poutine ?

Des fleurs déposées autour de portraits de l'opposant russe Alexeï Navalny, mort en prison, le 23 février 2024 à Francfort, en Allemagne




Deux des voix dissidentes les plus influentes au Kremlin en moins, quasiment coup pour coup. Après la mort d’Alexeï Navalny dans sa colonie pénitentiaire en Arctique le 16 février, la machine infernale de Poutine a cette fois-ci frappé un autre opposant historique : Oleg Orlov. Figure de l’ONG Memorial, luttant pour les droits humains en Russie et qui avait obtenu le prix Nobel de la Paix en 2022, a été condamné, ce mardi 27 février, à deux ans et demi de prison. Agé de 70 ans, Orlov, qui se battait déjà pour aider les prisonniers politiques sous Gorbatchev à l’époque de l’URSS, aura finalement subi les conséquences de sa critique acharnée de l’invasion russe de l’Ukraine.Si la Russie de Vladimir Poutine n’a bien sûr jamais été un havre de liberté, la répression envers les opposants au pouvoir s’est nettement accentuée depuis le début de « l’opération spéciale » en l’Ukraine, le 24 février 2022. Le constat est simple : bien rares sont les figures de l’opposition à 1. être toujours en Russie, 2. ne pas être en prison, 3. être encore en vie.Au-delà d’Oleg Orlov et d’Alexeï Navalny, on retrouve également de nombreux autres exemples, comme celui de Vladimir Kara-Mourza. Fervent opposant à la guerre en Ukraine et critique acerbe du régime de Poutine, il avait notamment déjà été victime de deux empoisonnements, en 2015 et 2017. Avant d’être finalement condamné en avril 2023 à vingt-cinq ans de prison pour « haute trahison », le terme utilisé pour discréditer toute opposition, ainsi que pour avoir diffusé de « fausses informations » sur l’armée russe, lors d’un procès à huis clos. Alexeï Navalny avait le droit à sa prison en Arctique, Kara-Mourza a quant à lui l’honneur de purger sa peine… en Sibérie.Sélection d’opposants politiques, institutions, médias ou mouvements s’étant opposés à Vladimir PoutineL’ONG fondée par Alexeï Navalny, le Fonds anticorruption, est d’ailleurs persona non grata en Russie. Désignée comme « organisation terroriste » en juin 2021 par la justice, tous ses membres sont susceptibles d’être poursuivis et condamnés à des peines de prison. Ce fut notamment le cas de Ksenia Fadeïeva, ancienne députée de 31 ans alliée d’Alexeï Navalny condamnée fin 2023 à neuf ans de prison. Ou encore en juin 2023 déjà, Lilia Tchanycheva, première collaboratrice de l’opposant n° 1 du Kremlin, jugée pour création d’une « organisation extrémiste » et condamnée à sept ans et demi de prison. Même les… avocats d’Alexeï Navalny ont été arrêtés ou sont recherchés par le pouvoir russe.Le révélateur de l’élection présidentielle du 17 marsUn épisode à venir incarne particulièrement l’impossibilité d’une quelconque opposition à pouvoir s’exprimer dans le pays : l’élection présidentielle du 17 mars. Ou plutôt le simulacre d’élection, alors que cette dernière doit permettre à Vladimir Poutine d’obtenir un score au plus près des 100 %, afin de témoigner du plébiscite absolu accordé par le peuple pour son régime et la guerre qu’il mène en Ukraine.Pour ce scrutin, toute candidature s’opposant au chef du Kremlin a été interdite par les autorités de Moscou. Il y eut notamment l’espoir soulevé par Boris Nadejdine, un homme politique de 60 ans relativement anonyme devenu au fil des jours la figure du pacifisme. Ancien proche de Boris Nemtsov – un influent opposant russe assassiné de cinq balles dans le dos en 2015 – et prônant la fin de la guerre en Ukraine, celui-ci aura suscité l’espoir de la possibilité de contester la suprématie de Poutine… avant de finalement voir sa candidature être invalidée par la commission électorale russe. En décembre dernier, c’est de la même façon la candidature d’Ekaterina Dountsova, opposante à Poutine et prônant la fin de la guerre en Ukraine, qui fut invalidée. Sans oublier évidemment tous les opposants principaux condamnés par la machine judiciaire répressive du Kremlin, et rendus inéligibles par la loi électorale russe.Face à Vladimir Poutine, trois candidatures fantoches ont finalement été autorisées : Leonid Sloutski, le chef du Parti libéral-démocrate de Russie, qui a promisau maître du Kremlin une victoire « énorme » en assurant qu’il ne lui enlèverait « pas de voix » ; Nikolaï Kharitonov, du Parti communiste, déjà candidat en 2004 et dont le parti a toujours soutenu Vladimir Poutine ; et Vladislav Davankov, président du parti Nouveau Peuple, pas beaucoup plus véhément envers le président russe mais qui a tout de même soutenu la candidature de Boris Nadejdine au nom du pluralisme. Autant dire que ce n’est pas de là que des voix dissidentes s’exprimeront.Les opposants forcés à l’exilDans leur grande majorité, les opposants au régime n’ont donc pas eu d’autre choix que fuir la Russie pour pouvoir s’exprimer librement et essayer, tant bien que mal, d’organiser la lutte contre Poutine. En décembre dernier, L’Express avait dressé un panorama large des différents courants et divisions au sein de l’opposition en exil à Vladimir Poutine, de l’oligarque Mikhaïl Khodorkovski à l’ancien champion d’échecs Garry Kasparov, du youtubeur Maxim Katz au Fonds anticorruption d’Alexeï Navalny. Des relations complexes qui pourraient bien être amenées à évoluer avec le décès de ce dernier, figure aussi omnipotente que critiquée au sein même de l’opposition. Mais aussi l’annonce par son épouse Ioulia Navalnaïa de la reprise de son combat.Parmi les figures de l’opposition encore en liberté en Russie, une se démarque assez largement : celle de Dmitri Mouratov. Prix Nobel de la Paix en 2021 et rédacteur en chef du journal indépendant Novaia Gazeta, interdit de diffusion après le début de la guerre en Ukraine, celui-ci a fait le choix de rester vivre en Russie alors que la majeure partie de sa rédaction travaille désormais depuis la Lettonie.Dans une interview donnée au journal Le Monde en octobre 2023, alors qu’il s’apprêtait à retourner à Moscou, le Prix Nobel qualifié d' »agent de l’étranger » par le Kremlin justifiait son choix de rester en Russie. « C’est très étrange de vivre dans sa patrie sans liberté, mais c’est tout aussi étrange de concevoir la liberté sans sa patrie. Les journalistes qui sont partis font un travail remarquable, sans censure, ils accomplissent leur mission. Ceux qui sont restés sont restés avec leurs lecteurs. »



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Publish date : 2024-02-29 06:56:59

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