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« Schengen militaire » : les dessous d’un projet qui inquiète la Russie

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky et son homologue américain Joe Biden, lors d'une rencontre en marge du sommet de l'Otan, le 12 juillet 2023 à Vilnius, en Lituanie




Il s’agit peut-être des prémices d’un « espace Schengen » pour les armées de l’Organisation du traité de l’Atlantique nord (Otan). Mercredi 31 janvier, la Pologne, l’Allemagne et les Pays-Bas ont signé une déclaration prévoyant la création d’un « corridor militaire » pour faciliter le déplacement de troupes et de matériel au sein des membres de l’Otan. Le projet d’une plus grande coopération militaire entre ces pays est régulièrement mis en avant, notamment depuis l’invasion russe de l’Ukraine.Aujourd’hui, les capacités des forces de l’Otan à opérer en Europe sont toujours entravées par des restrictions aux frontières et l’inadéquation des infrastructures, souligne le journal Politico, qui cite des commandants et des ministres de la Défense de l’UE. « Même si l’Otan a fait des progrès substantiels en surmontant les obstacles juridiques lors des opérations transfrontalières, des exigences bureaucratiques, comme les contrôles de passeport à certains postes frontaliers et des problèmes d’infrastructures, comme les routes et les ponts qui ne peuvent pas accueillir de gros véhicules militaires, pourraient ralentir, voire paralyser toute réponse alliée à une menace émergente », poursuit le média américain.Avant la guerre en Ukraine, ces différences se traitaient sans urgence. Depuis, les cas concrets de blocage ont servi d’alerte. Exemple phare : fin 2022, l’acheminement de chars Leclerc de la France vers la Roumanie avait été retardé, faute d’autorisation routière en Allemagne. Cette idée de facilitation des troupes militaires dans les pays membres de l’OTAN est ainsi calquée sur l’accord de Schengen, qui permet la libre circulation des personnes dans les pays constituant cet espace.La crainte de la RussieUn projet qui inquiète le Kremlin, dont les responsables ont rapidement conclu qu’il était surtout motivé par l’éventualité d’une attaque russe contre un pays membre de l’Otan, d’après l’hebdomadaire Courrier International. Alors que des débats sur un « Schengen militaire » ont commencé en décembre 2023, le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a aussitôt tenu à souligner que la Russie n’avait jamais représenté une menace pour l’Alliance. « Je voudrais souligner une fois de plus que c’est l’Otan qui se déplace constamment, avec son infrastructure, vers notre frontière. Cela ne peut que nous inquiéter. Et cela ne peut que conduire à des mesures de rétorsion pour assurer notre sécurité », a-t-il expliqué, cité par le quotidien Kommersant.En Russie, l’accord signé le 31 janvier entre les Pays-Bas, l’Allemagne et la Pologne a fait couler beaucoup d’encre. C’est déjà la « réalisation d’un Schengen militaire miniature », titrait le magazine Vzgliad. Tandis que selon Alexandre Bartosh, de l’Académie des sciences militaires russe, cette mesure est surtout motivée par le besoin d’approvisionner militairement une Ukraine qui serait au bord de la défaite.Un projet de longue dateLes questions de « mobilité militaire » sont inscrites à l’agenda des Européens depuis 2017, date d’un premier plan d’action. La ministre néerlandaise de la Défense de l’époque, Jeanine Hennis-Plasschaert, déclarait ainsi que « nous devons pouvoir nous déplacer rapidement partout où il existe une menace ». « L’un des principaux enseignements tirés de la livraison d’armes et d’équipements militaires à l’Ukraine pour lutter contre l’invasion russe est que chaque seconde compte. La mobilité militaire rapide est cruciale pour répondre aux crises qui émergent à nos frontières et au-delà », expliquait, fin 2022, le vice-président de la Commission européenne Josep Borrell.Depuis, des textes censés encadrer et coordonner les mouvements des hommes et du matériel de l’alliance atlantique sur l’ensemble du continent ont été signés. Une unité a même spécialisement été créée à cet effet en 2021 : le commandement conjoint de soutien et d’habilitation (JSEC) de l’Otan. Toutefois, ces avancées ne semblent pas suffisantes pour les responsables de l’alliance transatlantique. « Nous manquons de temps. Ce que nous ne faisons pas en temps de paix ne sera pas prêt en cas de crise ou de guerre », avait insisté fin décembre Alexander Sollfrank, le responsable du Commandement conjoint de soutien et d’habilitation (JSEC) de l’Otan. « Bien que le JSEC ait été créé en 2021 pour rationaliser les préparatifs en vue d’une guerre potentielle avec la Russie, son travail est toujours entravé par des réglementations nationales », avait-il rappelé.



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Publish date : 2024-02-04 18:42:32

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