Il n’y a pas remis les pieds depuis près de 2475 jours, a décompté la journaliste espagnole Cristina Rubio du quotidien généraliste El Mundo. Carles Puigdemont a fui la Catalogne, le 29 octobre 2017, deux jours après avoir proclamé l’indépendance de la région la plus riche d’Espagne, à la suite d’un référendum jugé illégal par l’Etat fédéral. Il trouva refuge en Belgique, où il réussit à se faire élire eurodéputé en 2019, pour un mandat. Ses sept années d’exil ont été émaillées par deux arrestations, l’une en Allemagne et l’autre en Sardaigne. A chaque fois, il sera relâché.Le voilà, sur les coups de neuf heures, ce jeudi, devant une assemblée d’un millier de sympathisants, accompagné de l’indépendantiste Josep Rull. Dans un court discours, lu sur un bout de papier qu’il tient un peu trop fermement pour paraître serein, il déclare – vidéo du journal El País à l’appui : « Je ne sais pas combien de temps va passer avant que nous puissions nous voir à nouveau, mes amis, mais peu importe ce qu’il se passe, quand nous nous reverrons, j’espère que nous pourrons crier de nouveau bien fort ensemble […] : Vive la Catalogne libre ! »Ces quelques mots prononcés, il s’évapore de nouveau en pleine nature, toujours visé par un mandat d’arrêt émis en 2019 par Pablo Llarena, juge à la Cour suprême. Il est le seul acteur de la crise de l’indépendance à ne pas avoir bénéficié de l’amnistie accordée par le gouvernement de Pedro Sanchez. Les Mossos d’Esquadra, la police catalane, ont pourtant mis en place la procédure Jaula – mot espagnol signifiant « cage » – pour contrôler les entrées et les sorties du périmètre dans lequel a été aperçu le leader indépendantiste. Mais, les locaux ont été trahis par l’un des leurs. A la mi-journée, les forces de l’ordre régionales ont annoncé l’arrestation d’un policier, dont la voiture a permis à Puigdemont de tourner casaque.Les enjeux d’un tel retourOutre narguer les autorités fédérales, Carles Puigdemont joue aussi son existence politique par son incongru retour. El País rappelle que « l’opinion des Catalans a évolué : les enquêtes du Centro de Estudios de Opinión montrent un déclin progressif du sentiment indépendantiste depuis octobre 2017 ». Cristina Rubio voit dans le retour de Puigdemont, une tentative d’imiter celui de Josep Tarradellas en 1977. Contraint à l’exil en raison du franquisme, le dirigeant catalan s’était distingué par cette phrase restée célèbre :« ja sóc aquí », qui signifie « je suis là ».Il y avait donc, bien entendu, une dimension politique dans la sortie de Carles Puigdemont. Son discours se tenait à l’Arc de triomphe de Barcelone, à quelques pas du Parlement régional où s’apprêtait à être investi le nouveau président de la Generalitat. Salvador Illa, du Parti des socialistes de Catalogne – élu en mai 2024 -, est le premier dirigeant non nationaliste de la communauté autonome depuis 2010.Il doit son arrivée au pouvoir aux négociations avec le parti de la Gauche républicaine de la Catalogne qui, en échange de la souveraineté fiscale de la région, a accepté de quitter l’alliance qu’elle formait avec les indépendantistes, dont le parti de Carles Puigdemont, Ensemble pour la Catalogne – Junts per Catalunya en catalan. Cela témoigne d’une certaine perte d’influence de la part du leader indépendantiste. Le tout nouveau président a néanmoins assuré à la tribune qu’il travaillerait pour que la loi d’amnistie s’applique à « tous les citoyens catalans ».
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Publish date : 2024-08-08 18:18:17
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